Apocalpyse Now fait partie de ces quelques films dont j’aimerai tant adorer, ces films qui laissent un bon souvenir au long terme et dont tu voudrais avoir la fierté de les adorer pour leur importance cinématographique. Mais la réalité est autre. En le revoyant mon avis est mitigé, je ne déteste pas Apocalypse Now, loin de là, mais je ne lui loue pas les louanges que j’aimerai.
Après avoir vu le film, j’ai du mal à me dire autre chose que « C’est un film super beau visuellement, sur un soldat qui traverse un fleuve pour aller tuer un colonel de son armée. Et … c’est tout… Je crois ? J’ai raté quelque chose je suis sûr… Mais quoi ? »
[Conclusion au dernier paragraphe]
En effet, ce qui me plait le plus dans Apocalypse Now, c’est son imagerie. Je suis vraiment sensible à cette magnifique teinte orangée qui imprègne chaque plan, à ce vert saturé de la jungle, au soleil et aux flares qu’il produit, ainsi qu’aux hélicoptères qui parcourt le ciel avec un certain lyrisme. Le film me laisse en tête une image magnifique faite d’orange et de vert. C’est d’ailleurs cette même imagerie qu’a su réutiliser avec talent Jordan Vogt-Roberts dans son Kong Skull Island.
Mais voilà, à part ses qualités plastiques, Apocalypse Now n’a pas su pénétrer mon âme. Je sens que Coppola a voulu créer un voyage introspectif au cœur de la psyché avec cette traversée du Nung, mais selon moi ça ne fonctionne pas.
Ca ne fonctionne pas car premièrement il manque des éléments de caractérisation au personnage de Willard pour que l’on s’attache vraiment à lui, et qu’on puisse traverser avec lui la folie humaine. Ici, il est montré insensible et assez passif durant le voyage – je sais que c’est fait exprès, mais tout ce qu’on sait de ce Willard c’est que le Vietnam l’a rendu un peu fou et qu’il est curieux de connaitre Kurtz. Mais c’est tout, ce n’est pas un grand traumatisé qui nous toucherait ou un anti-héros dont on comprenait les actes ; et il est juste curieux à propos de Kurtz, on ne le voit jamais nourrir une immense fascination au point de changer sa perception de la guerre. Je ne vois pas ce que la rencontre avec Kurtz lui a apporté en fait. Willard écoute le speech spirituel de 30min de Kurtz puis le tue, mais il n’y a aucune surprise : dès le début Willard savait que c’était un colonel qui avait ses raisons de devenir fou et que ce n’était pas le premier à le devenir. Quel était donc le but du film ?
Et deuxièmement, ce qui ne fonctionne pas selon moi est ce qui se passe durant le voyage. Ce ne sont que des événements interchangeables : le numéro de cabaret, le massacre de la pirogue, l’attaque par les flèches… Ce ne sont que des événements qui servent à montrer que le Vietnam rend fou, mais ça on l’avait compris dès le début avec les dialogues à table et avec le personnage du lieutenant-colonel. Du coup, ces événements s’enchainent sans vraiment de cause à effet, on dirait qu’ils permettent juste de meubler le voyage en attendant la fameuse rencontre avec ce mystérieux Kurtz… On regarde alors toutes les explosions et coups de feu d’un regard assez extérieur, sans ressentir de réelle tension.
Alors peut-être que ce n’est pas un film fait pour être narrativement poignant, mais dans ce cas là il fallait assumer pleinement son côté malickéen et contemplatif, en ne gardant pas ces scènes de guerres interchangeables qui nous détourne de ce qui importe vraiment : le trajet mental de Willard. Je trouve ça dommage de rester extérieur à ce qui aurait pu être quelque chose de vraiment transcendant. Et il y a trop de surimpressions ! On sent que Coppola avait trop de matières et qu’il voulait tout montrer en même temps, mais encore une fois on perd le caractère contemplatif ! J’aurai aimé avoir un beau plan des hélicoptères à contre-jour devant ce magnifique soleil orangé qui dure longtemps par exemple au lieu de le passer en vitesse donnant alors une impression de « faut vite passer au plan suivant qu’on s’est fait chier à filmer, ce serait dommage qu’on l’ait fait pour rien »
Apocalypse Now est donc un grand film objectivement empreint de visuel jouissif, mais dont je suis resté extérieur à cause d’un manque d’enjeu, d’une absence de progression dramatique et de personnage suffisamment attachant pour que je puisse suivre ce voyage avec passion. Le film a du mal à se situer entre film de guerre et épopée mentale.