J'ajoute à toutes ces bonnes critiques que ce film est aussi l'un des rares films de guerre qui laisse place à des silences, à la méditation, intervalles entre des moments chocs et inoubliables qui permettent de rythmer et de respirer. C'est une épopée, presque un road-movie. Sauvage sans être gratuitement violent, cocasse souvent (un tigre !), profond et initiatique, ce film questionne, il porte un message intemporel qui dépasse très largement le cadre du Vietnam. C'est-à-dire qu'il pourra être revu dans dix ou cinquante ans, et qu'il sera toujours bon. Car il parle de la nature humaine, des choix qui se posent dans des situations extrêmes, et finalement de la bizarrerie de notre espèce... Tout ce que font les personnages de ce film leur paraît normal, et a un sens pour eux, mais Coppola nous place en spectateur de l'absurdité de ces comportements d'individus, pris dans ce grand délire collectif qui s'appelle la guerre, ou la jungle, ou la vie...
Le film est esthétique mais a un côté assez malsain, car très réaliste, et un peu planant, ce qui peut déplaire à certains. Mais sa morale n'est pas noire pour autant. Le personnage principal, tel un Ulysse, arrive à surmonter toutes ces situations intérieures et extérieures, et devient finalement un modèle de résilience et de détermination, sans pour autant être un héros théâtral de pacotille comme on en voit tant. Il devient un homme.
Des répliques cultissimes, une bande son unique, des moments jouissifs, et un regard d'auteur complètement libre. Du grand cinéma.