Aller plus loin que les codes du genre
Le Western...
Un genre qui traverse les décennies avec plus ou moins de réussite.
Immortalisé par les couples John Ford / John Wayne et Sergio Leone / Clint Eastwood, le Western a connu ses heures de gloire il y a fort longtemps, jusqu'à ce qu'Eastwood remette le genre au goût du jour avec le divin Impitoyable en 1992, oscar du meilleur film amplement mérité (le troisième western seulement à avoir gagné la fameuse statuette, après La Ruée vers l'Ouest et Danse avec les Loups).
Hélas ce qui suiva ne relança pas la machine, Mort ou Vif de Sam Raimi étant même deux ans plus tard un cuisant échec.
Récemment, nous avons eu un 3H10 pour Yuma fort dispensable, et cette semaine sort Appaloosa, nouvelle réalisation d'Ed Harris, après Pollock qui lui vallu un florilège de compliments en 2000.
Retrouvant son compagnon d'History of Violence (2005), le trop rare Viggo Mortensen, Appaloosa allait-il réussir là où tant d'autres se sont cassés la gueule ?
Ce long métrage réunit tous les clichés (si l'on peut parler de "clichés") du genre : jolie demoiselle (Renée Zellweger) venant (tenter) de foutre la pagaille entre nos deux "Poor Lonesome Cowboys", le départ du héros vers le soleil couchant...
Ajoutez à cela un méchant (Jeremy Irons) pas si méchant voire même relégué au second plan, on pourrait penser que ce western ne vaut pas mieux les derniers. Lourde erreur !
Au delà des clichés, il y a des "codes" du western. Ici, ils sont tous présents. De l'attaque de train à la fusillade, des panoramiques sur de grands paysages magnifiques aux longs moments de silence, plus pesants que le son des balles qui sifflent, Appaloosa réunit tout ce qui fait d'un western un classique du genre.
Cependant, il va plus loin. Ed Harris insuffle à son long métrage un humanisme vibrant. Bien plus qu'un hymne au gunfight, Appaloosa est une ode à l'amitié. La relation Virgil Cole / Everett Hitch tient le haut du pavé, à la fois profonde, ambigüe, pleine de regards et de sourires rendant intense chaque instant de silence entre les deux hommes.
À aucun moment le film ne devient prévisible, il se construit au fur et à mesure sous nos yeux, et l'on sent une maîtrise absolue du metteur en scène à profiter de chaque minute de son oeuvre pour embarquer son spectateur là où il ne s'attend pas.
À ce titre, la décision d'Everett clôt de manière très poignante le film. La scène, anthologique, fait à elle seule l'apologie des liens qui le nouent à Virgil.
Un grand moment de cinéma, tout simplement.
En bref : Même s'il n'est pas le western du siècle, ni un chef-d'oeuvre absolu, Appaloosa n'en demeure pas moins un grand film sur l'amitié profonde que deux types peuvent entretenir dans un monde où les foies jaunes ne manquent pas. Poignant, vibrant, le dernier film d'Ed Harris est à l'image de son réalisateur : incontournable.