April Snow par Gérard Rocher La Fête de l'Art

In-su est éclairagiste pour des spectacles ce qui l'amène à se déplacer lors de certains événements artistiques. Au cours d'un des concerts dont il doit s'occuper il est informé par téléphone d'une nouvelle aussi catastrophique que surprenante. Son épouse vient d'avoir un très grave accident de voiture mais il apprend aussi une terrible réalité, sa femme n'était pas seule dans le véhicule mais en compagnie de son amant et les deux passagers sont plongés dans un coma profond.

C'est alors que In-su rencontre par la force des choses dans le hall de l'hôpital Seo-Young, l'épouse de l'amant de sa femme, appelée elle aussi au chevet de son mari. Il va donc falloir désormais pour ces deux personnages seuls et désemparés vivre avec au fond de leur cœur la douloureuse vérité de la vie secrète des deux victimes mêlée aux heureux souvenirs de leur vie de couple sans histoire.
Partagés entre peine et colère, In-su et Seo-Young tentent en premier de survivre moralement à ce choc en se soutenant mutuellement. Progressivement une relation d'entraide puis amoureuse, entachée d'un esprit de vengeance envers leurs conjoints respectifs s'établit progressivement entre eux.

Hur jin- Ho nous révèle son fabuleux talent de réalisateur. Il nous présente un film plein d'émotion, de tendresse, de délicatesse et d'une étonnante sobriété. Il nous décrit deux êtres dont la vie se trouve brusquement bouleversée par une trahison qui va les placer devant un dilemme peu banal. Voisins d'appartement ils deviennent incidemment de vrai "compagnons d'infortune" et l'analyse des comportements nous laisse devant une énigme bien légitime: comment vont-ils se comporter l'un envers l'autre ?

Le cinéaste nous séduit vraiment par petites touches tel un peintre en détaillant l'approche timide, méfiante de ces deux personnages qui finissent par se supporter, s'apprivoiser et s'aimer d'un amour fou. Celui-ci paraissant quasi impossible est constitué d'un mélange légitime de vengeance mais aussi de tendresse.

Les scènes qui se succèdent sont des plus émouvantes de par leur simplicité et leur naturel. Le moindre geste, la moindre parole, le moindre regard prennent dès lors une importance primordiale. Sans grandiloquence ni dialogue style mélo, la caméra suit avec retenue et pudeur le quotidien des personnages impliqués dans ce drame familial.

Ye-jin Son et Yong-jun Bae, jeunes acteurs au talent évident, sont enthousiasmants. Dans leur douleur, ils sont profondément bons et grands. Ils ne semblent pas jouer un rôle mais vivre, face aux témoins que nous sommes, un très mauvais rêve qui peu à peu, pour notre plus grand bonheur et le leur, se transforme en une belle et poétique romance.

Les petits bijoux ne sont pas si courants au cinéma, alors surtout ne manquez pas celui-ci. Cette œuvre n'est malheureusement pas très connue en France. Alors vite c'est le moment de la découvrir, découvrir deux vies qui passent lentement des tristes nuages noirs à l'éclaircie puis au soleil ardent.

Critique revisitée le 3 octobre 2022

Box-office Paris: 66 155 entrées

Ma note: 9/10