Après la déception d'un chef-d'oeuvre auto-proclamé indigeste au possible, rien de tel que de se replonger dans un tout petit film de l'âge d'or, une série B sans prétention des doubles programmes, mais avec du métier et plus d'ambition qu'il n'y parait...
Richard Fleischer fait ses classes et il se débrouille déjà très bien, c'est l'histoire d'un braquage de fourgon blindé à une époque où c'était encore exotique, c'est minutieux à souhait, faut dire que le méchant cerveau de la bande est un individu prudent et circonspect jusqu'à en devenir douloureusement mélancolique, c'est nerveux comme c'est pas permis et efficace comme rarement.
En 1h07, on jongle des détails du braquage à l'enquête policière, le tout dans un jeu du chat et de la souris technique et besogneux, ça peut paraître désuet parce que chaque détail a l'air d'avoir depuis servi à faire dix autres films mais c'est bougrement efficace. Des dialogues tranchants comme des rasoirs, un policier bougon et son jeune acolyte (le précédent s'étant faut dessouder par le vilain, forcément...) errent dans un Los Angeles digne du New York de La Cité sans voiles, il y a une blonde effeuilleuse et des seconds couteaux maladroits, un bandit à la lèvre vicieuse qui semble un mélange improbable de Vince Vaughn et de Sylvia Sydney dans des costumes trop classieux et trop larges...
Je me rends compte aussi que j'ai presque de la tendresse pour Charles McGraw, sous-Dana Andrews de huitième zone, parfait en détective Jim Cordell (rien que le nom est un délice pour les oreilles, on rentre tout de suite en plein dans le roman noir de gare...) à l'imperméable soudé aux épaules qu'il a, forcément, larges et renfoncées...
On pense peut-être un peu trop à Il marchait la nuit pour être pleinement émerveillé, mais on ne peut pas dire, c'est du bel ouvrage...