Arrietty - Le Petit monde des Chapardeurs par Ninesisters
Je connais les films du studio Ghibli depuis les années 90, et pourtant j’ai toujours plus de mal à aller vers leurs nouveaux films ; peut-être parce qu’ils ont imposé de tels standards de qualité, que je crains désormais à chaque fois d’être déçu. Après tout, ils n’ont pas créé que des animes exceptionnels, à l’image de leurs Contes de Terremer. Il m’a donc fallu quelques temps avant de me décider à voir Arrietty, le Petit Monde des Chapardeurs.
Quand j’étais au collège, nous étions allé voir le film L’Homme qui rétrécissait, dans le cadre du cours d’arts plastiques ; la prof voulait nous montrer que les auteurs avaient joué sur les points de vue, augmentant la taille de chaque élément de décor – par exemple un téléphone – puisqu’il n’était pas possible que faire réellement rapetisser l’acteur et que les images de synthèse n’existaient pas. Avec Arrietty, j’ai retrouvé ce travail sur les points de vue, les perspectives, et la découverte d’un environnement familier dans les yeux d’un être minuscule. La phase de recherche dans la maison, au début, m’a tout simplement bluffé par l’impression d’immensité qui se dégage de chaque plan, et par le sentiment de danger qui en découle. Les animateurs ont poussé le vice jusqu’à adapter la physique à la taille des personnages, comme lorsque la mère sert le thé sous forme d’énormes gouttes. Cela peut paraitre superflu voire décalé de mentionner ces aspects, mais cela dénote tout le soucis du détail de ce studio. Un point qui m’a toujours subjugué dans leurs productions, c’est la végétation ; elle est plus vivante et crédible que dans n’importe quel film d’animation, tout simplement car elle est désordonnée et explosive ; l’herbe pousse entre les dalles des jardins, aucun arbre ne ressemble à un autre, comme si l’homme n’avait aucune emprise sur eux.
D’un autre côté, il n’y a pas grand chose à dire sur le scénario. Ce sont Les Minipous à la sauce Ghibli, et cela se résume presque à la rencontre entre Shô, enfant malade et délaissé par ses parents, et la minuscule Arrietty, femme forte comme les aime Hayao Miyazaki (qui se charge ici de l’adaptation du roman d’origine). Ce film nous montre des petites aventures du quotidien, qui évidemment du point de vue de l’héroïne prennent des proportions gigantesques. Arrietty repose plus sur son ambiance reposante, son cadre bucolique, l’affection que nous pouvons porter aux chapardeurs, et la poésie qui se dégage de l’ensemble. Nous n’évitons pas au passage l’incontournable message écologique, ici sur les espèces en voie de disparition.
Outre la qualité purement technique habituelle du studio, ce long-métrage repose sur un énorme point fort : sa musique. Nous en avons beaucoup parlé en France puisque la compositrice, Cécile Corbel, est Bretonne ; et puis, l’histoire est belle, celle de la petite Française qui envoie un jour son CD au studio, et qui est comme par miracle choisie pour apporter une identité musicale nouvelle. Mais honnêtement, la musique magnifique qu’elle a composé pour l’occasion, avec ses mélodies entrainantes et le son cristallin de sa harpe, est un enchantement qui se marie à la perfection avec l’ambiance douce et mélancolique de Arrietty.
Je vais me répéter, mais Arrietty, le Petit Monde des Chapardeurs est définitivement un film d’ambiance. Il n’apporte rien de nouveau, ne révolutionne rien, ne restera pas dans les annales du studio au même titre qu’un Princesse Mononoke (dont je suis fan), mais je l’ai trouvé envoutant et reposant, au point de le considérer peut-être comme leur meilleure production en dehors des réalisations de Hayao Miyazaki. Ce n’est jamais méchant, l’héroïne est à la fois touchante et somptueuse, le réalisateur fait preuve d’intelligence dans ses plans et ses détails sans jamais se montrer détaché de son sujet, la musique nous berce tout le long du film ; aucune extravagance, aucun grand message à faire passer, juste un concentré de poésie et de gentillesse.