Ascenseur pour l'échafaud, c'est quand même un titre sublime en plus d'un titre qui claque !
Louis Malle conclut la scène d'ouverture de son film par : "Mais ce n'est pas très courageux l'amour." Tout commence donc très bien pour ce qui malheureusement sera l'une des très rares bonnes répliques de ce polar. Le meurtre initial de son patron par Julien Tavernier (Maurice Ronet), voulant faire croire à son suicide, s'avère également très réussi, sauf que franchement, l'oubli majeur qui suivra, j'ai quand même eu toutes les peines du monde à y croire ! Et j'ai mis pas mal de temps à m'y soumettre...
Surtout que bon, il aurait peut-être été plus prudent pour effacer cet indice de monter par les escaliers plutôt que l'ascenseur... Enfin voilà quoi, il bosse dans cette boîte le Tavernier, et il est donc censé être au courant de son fonctionnement, non ? Du coup, niveau crédibilité, on ne part pas vraiment sur du solide.
Pendant ce temps, un couple de jeunes assez bas du front lui pique sa décapotable, qu'il a laissée tourner avant de remonter par l'ascenseur... Et franchement, on aurait préféré deux meilleurs acteurs : de vraies plaies. L'autre grand wtf de ce film étant
ce double-suicide aux médocs, certes romantique quoique mal dialogué, qu'ils réussissent à manquer ! Franchement, c'est tellement pratique tout ça...
Bon, je passe sur les faux-raccords (figurant pris en flag, plan immobile pendant que l'ascenseur descend) et quelques lourdeurs avec les allemands pour ne pas trop décâbl... euh, accabler ce film de 1955, parce que heureusement il y a aussi de bonnes choses, voire de très bonnes. Et d'abord, la très belle photographie noir et blanc, sublimant une Jeanne Moreau, élégante et désirable comme jamais, à la recherche de son amant dans les rues de Paris, sillonnant ses bars de nuit, traversant tel un fantôme son dense trafic, sous les grondements de la foudre, les larmes de sa pluie, et aux notes de l'envoûtant jazz de Miles Davis, vaut à elle seule le détour.
Aussi, les deux situations compliquées et finissant par se recouper rendent les choses plus qu'intéressantes, notamment vis-à-vis de la police, du substitut du procureur et de la presse, démontrant à quel point celles-ci peuvent trop souvent être prises par-dessus la jambe par une justice expéditive et trop sûre d'elle.
Enfin, l'épilogue, avec toutes ces connaissances et ces inconnus dévisageant un Tavernier bien loin de se douter de ce qui se passe, puis l'impasse de son interrogatoire et les dernières "révélations" du Motel, permettent au film de Louis Malle de se conclure sur une excellente note.
Sur le fond, j'aimerais croire à une remise en cause de la modernité matérialiste (ascenseurs, voitures, photos, etc.), mais je n'en suis pas sûr... Quoi qu'il en soit, que ce scénario m'a gavé de facilités ! Dommage.
6,5/10