J'ai 12 ans, on doit être début 1984, et je découvre ce film à la télévision avec mon père, sans doute sur Antenne 2, un soir de semaine. Ce film me traumatise et me bouleverse, et ce choc perdurera toute ma vie. Je n'ai jamais revu le film, mais je ne l'ai jamais oublié. Cela fait 37 ans que je fais tout pour le revoir, que je le recherche ardemment, en parlant à tout le monde, créant une sorte de mythologie autour de ce film disparu et jamais édité sur support, le premier long-métrage de Denis Amar. J'avais bien fini du temps du mulet à mettre la main sur un vieux rip tv absolument dégueulasse, mais c'était tellement immonde que je préférai ne pas salir mon souvenir en m'infligeant cela. J'avais donc fini par faire mon deuil. Je ne reverrai jamais ce film qui m'avait tant marqué. Et puis il y a quelques semaines, j'ai eu l'info : JB Thoret allait rééditer le film en bluray dans sa collection Make My Day ! Le film que je cherchais le plus au monde ! J'ai eu l'impression qu'il ne le faisait que pour moi. Mais visiblement pas, car j'ai découvert alors que ce film était très recherché et jouissait d'une réputation à la grande aura. Bref, il est sorti avant-hier, je l'ai revu hier, et, c'est un fait si rare qu'il faut le préciser : je n'ai pas été deçu. Bien sûr, comme ça fait 37 ans que je le recherche et que du haut de mes 12 ans j'avais été impressionné comme un enfant devant un objet pour adultes, je l'avais forcément mythifié, mais le film est bel et bien excellent, bel et bien traumatisant, au moins autant qu'avant. Sans vous raconter le film, car je veux que vous le découvriez comme moi enfant, sans rien en savoir, il se déroule le 31 juillet lors des grands départs en vacances, et quasi uniquement sur l'autoroute, d'où son titre. Le film est d'une noirceur abyssale, tous les personnages sont antipathiques, c'est sombre et desespéré, incroyablement dur, et je comprends pourquoi j'ai été si marqué enfant. D'ailleurs, je pense que, je suis même sur que, mon aversion pour la voiture, pour la conduite, j'ai toujours refusé de passer mon permis tout en m'y étant inscrit, et ayant payé le forfait, à trois reprises, vient de ce film. Je suis remonté au traumatisme originel. Au-delà de ça, le film est incroyablement bien mis en scène (pour un premier film, ça semble dingue), n'a absolument pas vieilli de ce côté-ci non plus, et est super beau plastiquement, utilisant au mieux ces architectures faites de lignes droites et de points de fuite, autoroutes, stations services, aires de repos, restauroutes, hôtels de bord d'autoroute... Amar s'inspire du cinéma américain nerveux des 70's (dont nous sortons à peine puisqu'il tourne en 1980), et son film est aussi un thriller noir bien nerveux, tout en dépeignant magnifiquement la société française de l'époque. Bon, voilà, je l'ai revu, je suis heureux, et le film quitte la liste des films que je cherche à tout prix à revoir pour intégrer celle des films de ma vie, définitivement.