Un premier film vraiment singulier et ambitieux, rappelant l'univers étrange et inquiétant d'un Alain Jessua, mais qui n'a pas réellement fonctionné sur moi.
"Asphalte" nous embarque sur l'autoroute des vacances, lors de l'un de ces fameux week-ends de chassé-croisé, où les juilletistes pressés de rentrer croisent les aoûtiens impatients d'arriver, dans une atmosphère oppressante et caniculaire.
Dans ce film choral, on suit alternativement une jeune femme abandonnée par son amant (Carole Laure), un père de famille beauf et imprudent (Jean-Pierre Marielle), ou encore un type choqué qui va errer sur l'autoroute à la suite d'un carambolage mortel.
En arrière-plan, on constate aussi les dégâts de la route à travers le regard d'un chirurgien surmené, et celui d'un ferrailleur qui réceptionne les épaves de bagnoles.
L'idée de départ est excellente, d'autant que le réalisateur Denis Amar choisit d'installer une ambiance inquiétante à la lisière du fantastique, mais le résultat se révèle hélas presque ennuyeux, la faute à un rythme défaillant, et à des historiettes finalement assez chiantes.
L'aspect formel laissait également à désirer dans la version que j'ai vue, avec une photo souvent trop sombre, quelques dialogues inaudibles, et parfois un certain amateurisme dans la mise en scène et l'interprétation.
Dommage car le cadre choisi est évidemment ciné-génique, d'autant que Denis Amar prend soin d'intégrer à sa narration la plupart des lieux attendus dans un tel contexte (péage, station-service, restauroute, bande d'arrêt d'urgence...)
Autre bon point, les séquences d'accidents de la route s'avèrent remarquables de réalisme : on n'est pas dans un blockbuster américain, c'est à dire que les carambolages apparaissent crédibles, sans sacrifier à leur dimension spectaculaire. Rémy Julienne et ses équipes ont effectué un travail impressionnant, d'autant que le nombre de voitures impliquées est à chaque fois considérable.
Face à cette débauche de moyens, on comprend que Denis Amar a bénéficié du soutien (notamment logistique) des autorités, comme le confirme un carton final pré-générique, qui signale la collaboration des Armées, de la Gendarmerie et de la Croix-Rouge.
Ce qui fait en quelque sorte d'"Aspalte" un film de prévention et de sensibilisation (contre la vitesse, l'alcool), à une époque où la route reste la première cause de mortalité en France.
Nul reproche dans ce constat, puisque le message est diffusé de manière presque subliminale, loin d'un éventuel matraquage qui aurait dénaturé les ambitions artistiques du projet.