Réunion censée casser la baraque entre trois figures incontournables du cinéma d'action des années 80 / 90 (Stallone en tête d'affiche, Richard Donner à la mise en scène et Joel Silver à la production), Assassins, relatif échec à sa sortie, est de ces films trouvant un parallèle intéressant entre l'histoire qu'ils racontent et l'époque à laquelle ils appartiennent.
En effet, difficile de ne pas faire le lien entre ces deux tueurs que tout oppose (l'un est un vieux de la vielle fatigué, l'autre un jeune chien fou qui veut lui voler son trône) et le trio à la tête du film, vieux briscards connaissant leurs dernières de gloire face à une concurrence juvénile redéfinissant les codes du genre. D'autant que le script fut d'abord rédigé par les frangin(e)s Wachowski (qui représenteront d'ailleurs quelques années plus tard l'ultime coup de flair de Silver), avant d'être remanié par Brian Helgeland.
Nous sommes en 1995 et le monde change. Les démocrates arrivent au pouvoir, New York devient propre et tendance, et surtout, les attentes des spectateurs ne sont plus vraiment les mêmes. Aux gros bras dignes de statues grecs, le cinéma préfère des héros plus fragiles, plus torturés, plus accessibles. Visiblement conscient de cette mutation (on peut d'ailleurs apercevoir un logo anti-NRA sur la façade d'un bus), Assassins tente comme il peut de s'engouffrer dans cette nouvelle mouvance.
Malheureusement, hormis l'amusant effet de miroir entre le film lui-même et l'époque de transition à laquelle il appartient, il n'y a franchement pas grand chose à voir dans Assassins, jeu du chat et de la souris aux intentions louables mais dont le résultat laisse perplexe.
Est-ce dû aux réécritures ou pas, toujours est-il que le scénario peine à maintenir son audience éveillée, s'étirant inutilement en longueur pour raconter une histoire consensuelle et prévisible, jamais palpitante, bourrée d'invraisemblances et s'achevant sur un twist final ridicule.
Peu motivé par l'entreprise, Richard Donner ne se foule pas et n'essaie même pas de rendre une copie efficace, enchaînant platement les séquences, sûrement endormi derrière son combo. Et ce n'est pas la photographie affreusement terne (pourtant signée Vilmos Zsigmond) qui va arranger les choses.
De leur côté, les comédiens ne montrent pas non plus un véritable enthousiasme, seconds choix qu'ils sont de toute façon. En lieu et place de Mel Gibson, Sylvester Stallone semble paumé, Antonio Banderas cabotine à mort dans un rôle prévu pour pleins d'autres acteurs avant lui, et Julianne Moore se contente de montrer sa jolie frimousse parce que c'est toujours utile de jouer dans un blockbuster quand on est pas encore connue.
Cas typique du long-métrage incendié à sa sortie et qui reste toujours aussi mauvais des années plus tard (l'inverse arrive aussi, heureusement), Assassins est un ratage presque complet, et illustre parfaitement la chute de grands noms du cinéma populaire des années 80, ceux qui savaient offrir de sacrées péloches bien burnées et qui ont perdus leur mojo depuis.