Asterix est aujourd’hui au cinéma ce qu’un chewing-gum est aux papilles gustatives d’un élève de 3ème à la fin du voyage Barcelone-Paris en bus : exsangue, lessivé, essoré par un surnombre de blockbusters merde in France, du franchouillard Zidi à l’honorable Canal Chabat, des footeux sportifs aux statues du musée Grévin.
Une nouvelle version laisse donc fortement dubitatif. Mais bon, Astier... et l’animation, bonne idée pour retrouver des racines un peu plus authentiques.
Le résultat est vraiment convaincant. Pour les amateurs du créateur de Kaamelott, on retrouvera son écriture incisive et son comique fondé avant tout sur les dialogues : ça fuse, ça s’embourbe comme on l’aime, entre l’incompréhension des crétins au service de César, les revendications syndicales des soldats forçant le légionnaire à donner ses ordres avec politesse ou l’affranchissement retors des esclaves. Vif, satirique, habilement destiné aux adultes dans la salle, ça ne brille pas d’une originalité hors norme, mais c’est très bien troussé.
Mais c’est là où on attend l’animation qu’Astier et ses comparses avaient du fil à retordre, et qu’ils s’en sortent vraiment bien. Le choix est élémentaire, et ce retour aux fondamentaux a tout d’un bain de jouvence : traiter Asterix comme un cartoon.
Il est tout de même assez impressionnant de voir que le film d’animation annule instantanément toute la laideur de la CGI dans les films de la saga. La prise de la potion est un éclair doré, et non cette affreuse transformation faciale héritée des pires effets des Visiteurs. La séquence, d’ailleurs, durant laquelle les Gaulois bluffent sur l’effet de la potion pourrait être vue comme une parodie des films et de leur mauvais goût sur la question.
Puisque ça se castagne à tout va, autant mettre le paquet sur ce ressort-là, et on s’en donne à cœur joie. La potion magique irrigue les scènes les plus inventives, d’une chasse au sanglier digne d’une course de char ou d’un rollerball, et le film décline à l’envi les 1001 façons de s’extraire du sol suite à un coup de poing. Ballet céleste, bataille de poissons, destructions immobilière où Obélix se transforme en King Kong…
Frais, enlevé, monté avec une vraie malice, Le Domaine des Dieux ravive enfin la flamme moribonde des petits Gaulois. C’est une bonne nouvelle pour la France.