Astier risque et réussit : Astérix est réussi.
Une aventure d'Eclectix le gaulois
Nous sommes en 2014 après Jésus-Christ. Toute l'industrie du cinéma est occupée par la production de masse Hollywoodienne... Toute ? Non ! Un réseau social peuplé d'irréductibles membres du chef SensCritix résiste encore et toujours à l'envahisseur.
Nous étions cinq gaulois dans Lugdunum* :
Chocolatine (Before-Sunrise)
Flopdix (SeigneurAo)
Enthéorix (peterKmad)
Animatrix (Gary Lafayette)
Et Eclectix, moi-même, venu d'Avenio* rencontrer tout ce beau monde.
*Lyon
*Avignon
Nous nous installons en salle, en ce début de dimanche après-midi. Beaucoup d'enfants, du coup. Flopdix, assis à côté de moi, se déconfit à la découverte de la bande annonce de Maya l'abeille. On aurait dit que le ciel lui était tombé sur la tête.
Alors, ce film ? Par Toutatis, je suis heureux ! Oui, heureux.
Car à mon sens Alexandre Astier réalise un tour de force. Celui de marier son univers à celui de Goscinny sans que l'un nuise à l'autre. Pour la première fois, depuis toutes les adaptations récentes qui ont été faites, je suis sorti en pensant : « Goscinny aurait adoré ».
Par Belenos, quel beau travail !
Niveau animation, déjà. Pour une production gauloise, c'est de haut vol. Saluons l'empreinte de Louis Clichy, qui a bossé chez Pixar. Bien sûr, l'esthétique est un peu lisse, et les mouvements moins fluides que dans les productions les plus abouties de notre époque. Mais ça ne gène en rien le rendu général.
C'est beau. Soigné. Efficace. Les personnages sont reproduis au détail près. L'action est jubilatoire, cartoonesque et vivante.
Le rythme parfaitement soutenu. Action et humour s’enchaînent sans traîner du pied.
Mais la question légitime qu'il faut se poser sur un tel film est toute autre. L'âme d' Astérix, c'est quoi ? À mon sens, elle se compose en trois lectures.
Lecture un : d'abord, du pur divertissement. Des idées originales et amusantes, une aventure riche en péripéties. De la baston, du voyage, du rire. De quoi toucher un public large, enfants et adultes confondus.
Lecture deux : Des jeux de mots, des références, de la caricature. De l'anachronisme (l'anachronisme étant d'ailleurs la force, le pilier même de Kaamelott)... Subtilement refléter le noyau de notre société, souligner ses travers, et avoir encore la force d'en rire.
Lecture trois : Le message général, le fond de l'histoire. Le rendu d'ensemble et le message qu'il véhicule.
Voilà selon moi la vraie recette de la potion magique qui a rendu Astérix si extraordinaire.
Astier et Clichy n'en ont oublié aucun ingrédient.
De la rhétorique façon Kaamelott, des trouvailles, mais aussi la reprise de tout ce qui fait la force de la BD originelle ; un des meilleurs albums de la série, beaucoup s'accorderont à le dire.
La Gaule à bien changé depuis le temps de César. Elle est maintenant dans les remous de la mondialisation, elle est morcelée, compliquée, enfuie sous la paperasse. La politique rame.
Bref : tout va à l'encontre du BON SENS.
Astier dénonce avec mordant et lucidité cette bêtise ambiante, cette anti-productivité. Tout le monde en prend pour son grade. Les syndicats. Le patronat. Les politiques. Les gens.
Tout en finesse.
En fait, c'est simple : Les enfants riaient. Les adultes riaient. Flopdix riait. Et je riais tout aussi volontiers.
Le domaine des Dieux a tout pour plaire, à grande échelle comme à petite échelle.
Tout ne m'a pas plus pour autant. À mon sens, un combat final trop barré, qui jure avec le reste. Obélix en mode Kung-Fu Panda, non merci. Oui oui, j'ai compris la référence à King-Kong. Mais ça a eu un peu de mal à passer.
Agecanonix qui fait du karaté, très peu pour moi. Et caetera.
On pourrait aussi regretter l'ajout de l'enfant dans la famille romaine inventée pour le film. On dirait qu'il n'est là que pour que les petits s'identifient, ce qui n'est pas nécessaire. Mais cette famille est loin d'être de trop, leur rôle dans le scénario est totalement justifié et leurs gags plutôt bons.
Au final, ces défauts ne font que relever la qualité d'ensemble. Mais ce sont les minimes grossièretés qui l'entachent et l'empêchent de devenir le grand film qu'il aurait pu être à mes yeux.
Astier a pris du recul. A l'instar de Chabat (dont j'aime beaucoup la version, plus personnelle mais très réussie à mon goût), il a su se fondre dans l'univers de Goscinny.
Uderzo, ce traître, ce faux ami, a massacré Astérix; suivi de quelques réalisateurs qui l'ont sciemment violé, souillé, bafoué, noyé dans le médiocre.
Merci, Astier. Merci, Clichy. Merci à toute l'équipe. Vous avez su redonner vie à Astérix, lui rendre sa splendeur, lui redonner tout son sens.
René Goscinny, ce génie, ce grand homme, peut à nouveau reposer en paix.
Sans forcément partager mon enthousiasme, toute la troupe était assez d'accord.
Pour finir cette aventure, nous rencontrâmes Paindépix (Epice) et nous nous restaurâmes chez Paulboutix, bavassant sur le cinéma et le grand chef SensCritix, s'insurgeant sur l'usine hollywoodienne, sur les licences surexploitées, s'enflamment sur des désaccords, passionnés mais rieurs. Rassasiés de cinéphilie.
Alea jacta est.
Sous le soleil hivernal de Lugdunum et sous la protection de Toutatis, Dieu de la tribu, de Rosmerta, la providence, et de Cernunnos, Dieu de la nature, les gaulois réunis se réjouissent du présent, sans penser à l'avenir.
FIN
de l'épisode
http://www.senscritique.com/liste/Au_dela_du_virtuel_l_aventure_continue_Journal_de_mes_rencon/707902