Après deux films à traiter d’invasions extraterrestres, le prolifique réalisateur Kiyoshi Kurosawa – aucun lien avec Akira – revient sur Terre, bien qu’il y ait autant d’incompréhensions entre cette équipe de tournage et la culture ouzbèke qu’entre l’humanité et les aliens. Ce Lost in Translation en Asie Centrale s’attèle donc à plonger ses personnages dans un décalage absurde avec leur environnement. Il y a ce décor exotique et la barrière de la langue qui confinent ces Japonais à filmer des événements dont ils ne cernent jamais la véritable nature. Même au sein de cette bulle, la communication est compliquée entre un réalisateur qui ne souhaite montrer que « ce qu’attend le public » et son équipe technique plus ouverte à filmer les aléas du quotidien. Ainsi, l’équipe de tournage va perdre son temps à chercher une créature mythologique qui n’existe pas plutôt que de s’intéresser à l’Opéra de Tashkent décoré par des ouvriers japonais. Avec ce dispositif de film dans le film, Kurosawa questionne évidemment la démarche de filmer avec cette caméra qui « change le regard ». Pourtant, Au bout du monde est bien plus qu’une mise en abîme du cinéma. Il y est question de couper des laisses, d’échapper aux enclos et de sortir de sa zone de confort afin de réaliser de véritables rencontres.


Initialement, Au bout du monde ne devait être qu’un simple film de commande célébrant les liens entre le Japon et l’Ouzbékistan. Finalement, on se retrouve face à une œuvre indescriptible, quelque part entre En terre inconnue et une odyssée intérieure intimiste, Kurosawa parvenant à transformer ce mandat en film inclassable et très personnel. Si le spectateur est prêt à pardonner certaines répétitions et baisses de rythme, il sera alors embarqué dans un voyage singulier que seul le cinéma peut proposer.

el_blasio
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le 25 oct. 2019

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