Dès son premier long-métrage, la réalisatrice géorgienne Dea Kulumbegashvili semble avoir des idées très précises de mise en scène, Au commencement privilégiant les plans fixes dans lesquels les personnages sont le plus souvent éloignés du premier plan. Des choix forts, dans une histoire aux résonances bibliques, qui interroge la notion de péché, entre autres sujets. La qualité formelle et l'exigence artistique du film lui ont valu d'être récompensé dans tous les festivals auxquels il a participé (San Sebastian, Trieste ...). Son dispositif austère est fascinant mais il est parfois poussé un peu loin, synonyme de froideur et de distance avec son héroïne, Yana, laquelle reste tiraillée entre son devoir d'éducatrice de jeunes enfants (au sein des Témoins de Jéhovah) et ses propres aspirations de femme. Yana est doublement ostracisée de par l'hostilité locale aux croyances qu'elle représente et de par sa condition dans une société éminemment patriarcale. C'est avec la dureté et l'ascèse d'un Dreyer ou d'un Haneke que Kulumnegashvili a construit un film qui ne parlera pas à tous les publics, avec sa radicalité esthétique, son absence de B.O et sa lenteur qui prend de temps en temps des postures auteuristes. Avec Au commencement, une grande cinéaste est vraisemblablement née même si elle doit se méfier d'une tendance un peu trop marquée au symbolisme, voire à l'abstraction.

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le 4 févr. 2021

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