Les Collines De La Miséricorde!
Le propre du cinéma est de vous embarquer dans un refuge auquel vous n'avez pas ou peu accès dans votre propre vie.Et plus encore,de vous y confronter de tel sorte que ce voyage dans l'inconnu vous questionne et vous incite à bousculer vos supposés acquis."Au-delà des collines" en possède toutes les caractéristiques et il est en cela totalement universel,bien qu'il prenne pour cadre la Roumanie et arrime son intrigue dans un couvent de nonnes Jésuites.Le titre du film dit bien la complexité de la situation qu'il expose,de par ses possibles multiples significations.Le sens littéral est assez explicite puisqu'il situe la localisation géographique précisément,dans une pleine déserte à flanc des collines.Mais il pourrait tout aussi bien désigner l'attention que l'on doit porter au caractère ambigu de cette étude biblique de la foi,aller au delà de la signification de ce que nous donne à voir les images.Estimer que le long-métrage ne s’embarrasse d'aucune vérité et tient bien plus de la fable christique que de la rigueur catholique n'est pas non plus à sous estimer.On voit donc bien par la ce que sous-entend Christian Mungiu et sa fin,sèche mais implacable,atteste l'envie manifeste de densifier son propos.
Point n'est besoin de croire en quelque religion que ce soit pour adhérer au projet car son but n'est pas de justifier ou d'accabler La Puissance Miséricordieuse,loin s'en faut,mais plutôt de soumettre à notre regard forcément partial le déchirement glacial de ce don de soi.L'Ecclésiastique et ses soupirantes,dans un geste de dévouement sacré,du moins le pensent-ils sincèrement,tenteront par leurs faibles moyens de ramener à la raison L'enfant du Péché,cette envoyée du diable venu tester leur sacrifice monacal.N'est-ce pas la la mission qu'il leur faut accomplir devant Dieu pour s'absoudre de toute vilénie?L'attitude,pour condamnable qu'elle soit,n'est jamais regardée avec condescendance et le metteur en scène fait au contraire preuve d'une belle et touchante empathie envers ces envoyés du Ciel.Il n'en dépeint pourtant aucunement des Saints venus prêcher le Droit Chemin et ne cache rien de leur brutalité,témoin le dialogue perturbant entre le médecin et le Pope.C'est la la principale force du récit,ne jamais basculer dans un manichéisme sot et vain.
Qu'en est il de l'incriminée?Victime de son amour inconsidéré pour sa jeune conjointe qu'elle retrouve après tant d'années de séparation,elle ne se résout pas à ce que celle-ci se soit convertie à L'Amour Sacré.Le choc qu'elle reçoit est indescriptible et la rend dans un état de quasi démence.Blasphémant avec force,elle sacrifie sa santé pour échapper à l'orthodoxie régnante autour de sa bien aimée et se réapproprier son cœur.Quel plus beau don de soi que la preuve d'amour éternelle?Cristallisant autour sa figure sacrificielle le doute et la remise en question de la croyance figée,elle est en cela l'autre versant de la foi chrétienne.La voie à suivre s'en trouve d'autant plus indécise que nul ne va à l'encontre de ses convictions les plus intimes et que la repentance inhérente à toute erreur est ici difficilement imputable à l'une ou l'autre partie.Dilemme cornélien que Mungiu ne cherche jamais à résoudre ou à expliquer,ne s'intéressant qu'aux faits et gestes du quotidien des ces damnés de la terre.Absolument pas convaincue par ces prières et prosternations comme rituels obligatoires,le refus d'une quelconque idolâtrie de la non pieuse jeune femme s'apparente aux yeux des religieux comme une évidence mentale qu'il faut à tout prix éradiquer.Constat accablant que cette incompréhension et ce dogmatisme d'un peuple qui ne peut se rencontrer qu'en s’affrontant.