Premier volet de la trilogie « Finlande », ce film contient tous les ingrédients que l’on retrouvera dans les trois films qui composent la série.
Le réalisateur emprunte aux codes de la peinture pour construire son esthétique. D’abord la composition aux couleurs complémentaires, des points de couleurs vives dans une ambiance feutrée. On pense notamment à l’influence d’Edward Hopper et les lumières des films américains des années 50. On retrouve aussi les jeux de contrastes et de lumières qui font la signature d’Aki Kaurismaki. Ensuite les différentes séquences du film sont filmées en plan-séquence ou de façon très statique, puis séparées par des fondues aux noirs quasi-systématiques donnant un effet haché comme une succession de « tableaux ».
Autre élément récurrent la présence du chien, rassurant, aimant, par opposition à la société décrite. En effet, le réalisateur peint une société finlandaise qui génère misère et injustices. Les personnages ont la vie rude. Pourtant ici, pas de solitude ni de misérabilisme juste des individus broyés par un système économique qui précarise toujours plus les plus pauvres. Solitude et espoir animent nos héros ordinaires. A ce titre, la séquence où l’ancienne maitre d’hôtel aujourd’hui au chômage retrouve son ancienne patronne est emblématique de l’indécence du système politique et financier décrit. Mais puis qu’avec Kaurismaki il n’est pas question de s’en tenir au réalisme, on basculera soudainement dans le happy end grâce à cette même patronne. Ce rebondissement vient comme appuyer la cruauté du système et souligner en même temps le fait que l’on ne soit pas dans la vie réelle. Tout est esthétisé, décoré, orchestré.
Cette trilogie érige l’amour comme remède à tous les maux. Si les mots sont incapables d’aider les personnages, il semble que ce qui les relie ensemble et ce qui donne d’ailleurs au film toute sa force c’est justement le temps passé ensemble. Ainsi les séquences sont peu bavardes, le temps passe dans le silence. Les personnages semblent être réunis dans le cadre malgré eux mais en même temps c’est ce qui créé le lien entre eux, ce qui les tient vivants.
Si les deux premiers volets sont optimistes et/mais caustiques, le dernier viendra quand même assombrir cette trilogie (presque) comique.