Tout jeune cinéaste qui se respecte se doit de débuter à un moment ou un autre par un premier film. Plusieurs options sont alors possibles, mais bien souvent les œuvres de jeunesse, qui cherchent avant tout le frisson et le plaisir, demeurent les plus plaisantes. En recyclant des influences, tout en essayant de se démarquer, cela aboutit parfois à des objets sympathiques et complètement bordéliques, à l’instar de cet ‘’Automaton Tranfusion’’, signé Steven C. Miller.
En 2006, le genre du zombie a retrouvé un nouveau souffle. Dès 2002, Eli Roth débarquait avec ‘’Cabin Fever’’, un film d’infectés très inspiré par ‘’Evil Dead’’ et le film de Morts-vivants en général. En 2004, suivait l’excellent remake de ‘’Dawn of the Dead’’ pa r Zack Snyder, qui venait dynamiter un genre poussiéreux. La même année, Edgar Wright nous offrait la comédie romantique ultime, avec plein de cadavres ambulants, dans ‘’Shaun of the Dead’’. Puis, en 2005, le père du zombie moderne, le désormais regretté George A. Romero, adoubait un peu cette mouvance avec son dernier chef-d’œuvre : ‘’Land of the Dead’’. Une réflexion métaphysique centrée sur les notions de vie et de mort, dans une société obsédée par son autodestruction.
Car oui, le film de zombie est avant politique puisque l’entité offre un reflet parfait pour évoquer une humanité en perdition, dans un monde à la ramasse. À tout juste 23 ans, Miller débarque ainsi dans le septième art avec un film de zombie classique dans le fond, mais nerveux dans la forme.
Il fait même preuve d’une certaine ambition, avec un récit qui brasse des thématiques axées sur le relationnel, où l’affectif devient un vecteur principal. Même s’ils montrent des limites face à une invasion zombie, l’amour, l’amitié et le lien père-fils… Attendez une minute… Votre cher rédacteur serait-il en train d’essayer de chercher du sens à ce film ?
Reprenons.
‘’Automaton Transfusion’’ est un petit film amateur complètement foutraque, mis en scène nerveusement par un jeune cinéaste passionné, un peu bloqué dans des références qu’il cite ouvertement au détour de moult punchline. C’est un flick horrifique généreux en action, avec une réalisation vraiment pas dégueux, contrairement à sa photographie. On n’y voit pas grand-chose, c’est flou, c’est sombre et ce qui se passe à l’écran est la plupart du temps illisible. Ce que n’aide pas le bon-sens relatif des dialogues, tout comme son intrigue simpliste, mais néanmoins ambitieuse.
En vrai, à première vue, ce film c’est de la merde, disons-le. Oui, sauf qu’il est fait par un vrai amoureux du genre et ça se voit. Il parvint à réunir un peu de thunes, quelques personnes (aucun figurant n’a été payé) et une indestructible envie de bien faire. Quelque chose dans ce film indique qu’il est emballé avec le cœur, ce qui du coup, rend difficile toute approche objectivement critique. Ce n’est pas une production arrogante qui prétend être ce qu’elle n’est pas. Au contraire, tout au long du récit, Steven C. Miller assume totalement sa place, avec tout le respect qu’il semble vouloir donner à ceux qui lui ont donné envie de faire du cinéma.
On entre alors dans les conceptions métamodernistes du cinéma contemporain. Sans George A. Romero, Wes Craven, Tobe Hooper, Sam Raimi, Stuart Gordon, Brian Yuzna ou encore Larry Cohen et toute une flopée de cinéastes retombés dans l’anonymat, ‘’Automaton Transfusion’’ n’existerait pas, du moins pas sous cette forme. Et c’est un plus pour le film, car sans cesse Miller se réfère avec allégeance à une génération et un cinéma de genre qui l’a sans doute bercé.
Alors, en effet c’est là aussi les limites du film, puisque ça le dessert à plusieurs reprises et jamais il ne parvient vraiment à se trouver une identité propre. Cependant, par une mise en scène souvent inventive et une générosité dans le gore, Miller proposer un spectacle réjouissant, surprenamment cohérent et très respectueux envers ceux qui l’ont inspiré.
Avec des moyens dérisoires, moins de 30 000 dollars et un calendrier de tournage étendu sur 9 jours, ce qui aboutit est l’œuvre d’un passionné, une proposition de cinéma maladroite, certes, mais honnête. Elle tient même la comparaison à pas mal de productions ‘’horrifiques’’ servies par des Studios frileux dès qu’il s’agit de proposer des spectacles gorets décomplexés. Ainsi le film de Miller devient une alternative sympathique pour passer un petit moment fun, sans grande prétention, autre que de divertir et de se marrer devant l’avalanche de tripailles en pagailles.
-Stork._