Aux Cœurs des Ténèbres d'Eleanor Coppola tente de faire le lien entre le film Apocalypse Now, et sa folie guerrière et le tournage lui-même,mettant à mal la santé mentale des divers intervenants. Le combat de Francis Ford.Coppola contre les aléas du tournage, son comportement l'amenant peu à peu à quelques réactions épidermiques, et ses moments de crises refusant les freins à son travail, qu'il soient financiers ou humains.
Apocalypse Now est la vraie réussite d'un cinéaste qui aura pris des risques et livre un film puissant qui aura fait des émules. On oublie qu'il suit de près Voyage au bout de l'enfer de Michael Cimino, tout autant marquant et certainement tout aussi éprouvant.
Apocalypse Now, Librement adapté de Joseph Conrad est transposé pendant la guerre du Viêt Nam et souligne par les personnages de Willard et de Kurtz la perception et les conséquences de la guerre. Coppola y marque les excès et le décalage, entre violence, humour et fantasme meurtrier. Alors jeune réalisateur il avait, grâce au Parrain engrangé l'argent nécessaire lui permettant de se lancer enfin dans ce projet, déjà repoussé faute d'investissement et de confiance de partenaires. D'un tournage qui n'en finit plus, et quelques allers-retours au pays, pour souffler, faute de pouvoir tourner, le réalisateur un peu poussé par les événements, finira de tourner dans des conditions climatiques extrêmes.
Mais ce sera bien les interventions de 1992 et le retour sur ce documentaire, où chacun, metteur en scène, épouse et acteurs, témoigne de leur expérience de tournage, de leurs visions et de leurs sentiments, qui risquent de donner une meilleure lisibilité au travail d'Eleanor Coppola.
Car l'épouse filme plutôt son mari, parfois inspiré parfois défait par l'adversité, sa réécriture incessante du scénario, les blocages d'un Marlon Brando capricieux et absent, quelques échanges ou commentaires sur la mise en œuvre de son travail, quelques interviews, au détriment de l'environnement plus global. Un typhon, des décors saccagés et une petite pensée pour les populations...Une crise cardiaque, la drogue à peine évoquée, ou les hélicoptères mis à disposition partant vers de nouveaux horizons...avec seulement deux scènes marquantes pour tenter de nous immerger, dont une pour Martin Sheen, complètement bourré et en rupture, en osmose totale avec son personnage. Acteur qui remplacera rapidement Harvey Keitel, remercié, dont on ne verra aucune scène non plus.
Comme W. Herzog pour Fitzcarraldo Coppola s'entoure d'autochtones pour certaines scènes, E.Coppola n'hésite pas, pour parfaire son ambiance à filmer le sacrifice de cochons hurlants ou d'un bœuf à multiples coups de machette et d'en souligner toute la beauté... et, nous renvoie de belle manière à cette distance condescendante de citadins venant se frotter aux gens du cru. Dérangeant.
Un film au tournage épique dont on ne verra pas grand chose, notamment sur les moyens techniques, sur le travail du son, les prises de vues, ou les moments pris sur le vif. Un sentiment d'inachevé dans ce que ce documentaire souhaitait révéler du tournage et de sa folie ambiante.
Reste une certaine nostalgie et une bonne piqûre de rappel pour un film qui aura marqué son époque, tourné bien peu de temps après la fin de la guerre du Viêt Nam et impacté la population américaine par sa critique sur l'implication du pays au conflit.