Pour son troisième et dernier long métrage en date le méconnu Jacques Nolot insuffle à son récit une large bouffée d'empirisme. Avant que j'oublie contient effectivement énormément d'éléments personnels de la vie de l'acteur-réalisateur : homosexualité, prostitution masculine, condition de l'écrivain ou encore problématique de la séropositivité sont autant de sujets abordés avec finesse et frontalité par l'artiste...


Un peu à la manière d'un certain Paul Schrader qui - en son temps - fréquentait les sex-shops new-yorkais Jacques Nolot apporte un témoignage sincère et touchant sur son expérience des milieux interlopes parisiens. Cinq ans après son très beau et confidentiel La chatte à deux têtes il réitère l'exploration des univers gays, filmant sa sexualité et celle de ses amis avec audace. Largement autobiographique Avant que j'oublie peut s'appréhender tel un film-somme, une sorte de synthèse du cinéma honteusement marginalisé de Jacques Nolot : lente, douce mais finalement terrible car empreinte d'inéluctable et de morbidité cette élégie silencieuse demeure parfois peu évidente, exigeante même ; par ailleurs l'écriture, soutenue mais prosaïque dans un même mouvement, porte en grande partie un récit dépouillé d'afféteries.


On tient là un film personnel, véritablement beau et authentique, étrangement délicat mais aussi cruel et habité par la mort. Jacques Nolot réussit à sublimer ses personnages en les respectant de part et d'autre du film : il évite le tapage et le sensationnalisme, préférant la tendresse au choc, délaissant le racolage au profit de la pudeur. Il signe un Cinéma jusqu'au-boutiste d'une élégante cohérence, dans la lignée de ses pairs Paul Vecchiali et André Téchiné. A réhabiliter.

stebbins
8
Écrit par

Créée

le 21 juin 2016

Critique lue 378 fois

5 j'aime

stebbins

Écrit par

Critique lue 378 fois

5

D'autres avis sur Avant que j'oublie

Avant que j'oublie
Fritz_Langueur
9

Les souvenirs et les regrets aussi...

Jacques Nolot est un témoin. Un témoin partial et privilégié sur des sujets qu’on évoque peu ou mal quand on traite d’homosexualité… La vieillesse, la maladie, la solitude, la mort. Quatre...

le 23 sept. 2014

3 j'aime

Avant que j'oublie
YgorParizel
5

Critique de Avant que j'oublie par Ygor Parizel

Film osé car encore de nos jours cette histoire est audacieuse. Les états d'âmes d'un quinqua homosexuel et dépressif peuvent choqué, mais en dehors de ça le film est très bavard. La mise en scène...

le 9 oct. 2012

Du même critique

La Prisonnière du désert
stebbins
4

Retour au foyer

Précédé de sa réputation de grand classique du western américain La Prisonnière du désert m'a pourtant quasiment laissé de marbre voire pas mal agacé sur la longueur. Vanté par la critique et les...

le 21 août 2016

44 j'aime

9

Hold-Up
stebbins
1

Sicko-logique(s) : pansez unique !

Immense sentiment de paradoxe face à cet étrange objet médiatique prenant la forme d'un documentaire pullulant d'intervenants aux intentions et aux discours plus ou moins douteux et/ou fumeux... Sur...

le 14 nov. 2020

38 j'aime

55

Mascarade
stebbins
8

La baise des gens

Nice ou l'enfer du jeu de l'amour-propre et du narcissisme... Bedos troque ses bons mots tout en surface pour un cynisme inédit et totalement écoeurrant, livrant avec cette Mascarade son meilleur...

le 4 nov. 2022

34 j'aime

6