Assez, marre, enfin, suivant : ces slogans étrangers au barnum habituel, destiné à rameuter le public habituel, sont pourtant ceux que pensent très fort les spectateurs les vrais, par ailleurs capables d’avoir apprécié les bons moments du MCU. C’est qu’il y a un temps pour tout et même pour conclure, mais que l’appât du gain a eu raison de la raison, sans oublier que les Avengers ont deux défauts, celui de n’être qu’un rassemblement prétexte à affrontements, et celui de ne pas avoir donné de film à la hauteur d’Iron Man. Donc, les vendeurs téléguidés, qui avancent masqués sous les noms de distributeurs ou d’influenceurs, font passer le fait de réserver sa place avant la sortie pour un réflexe de défense dans la jungle de la culture populaire. Et surtout, les créateurs autoproclamés, qui ne mériteraient pas même le nom de créatifs dans des milieux moins superficiels que le cinéma grand public, choisissent la stratégie de ceux qui n’ont plus rien à dire mais restent très écoutés, celle de la rallonge en ayant fait un diptyque de leur épisode final et en étirant le second volet sur trois heures…


Pourtant, la promotion ne fut pas seulement ce dévoilement pudique et lent d’une super-poitrine qu’on ne saurait voir avant la date de péremption, et les réalisateurs y ont ajouté un petit grain de sel en se fendant d’un appel intéressé, que seul un Henri-Georges Clouzot pouvait se permettre car il ne vivait pas au temps des réseaux sociaux ni du cinéma jetable, et accessoirement était un grand cinéaste : « Because so many of you have invested your time, your hearts, and your souls into these stories, we’re once again asking for your help. When you see Endgame in the coming weeks, please don’t spoil it for others, the same way you wouldn’t want it spoiled for you. » Mais c’est donner hypocritement un blanc-seing aux résoteurs qui parlent pour ne rien dire, ou savent seulement dire qu’ils ont aimé sur tous les tons, sans avoir le vocabulaire ni les idées pour développer, dans ce cercle vicieux où les jokers de langage deviennent des arguments de vente dès qu’ils sont suffisamment relayés, jusqu’aux médias qui en font des florilèges à défaut de faire des articles : « everything you want it to be and more », « immensely satisfying payoff », « so many emotional moments » etc…


Prenant d’abord le contrepied du premier volet, le film fait suivre Thanatos de Pathos, et pose très vite deux questions dispensables : Thanos va-t-il encore être le super-vilain après avoir été tué, laquelle de Carol et Natasha va gagner le concours de la coiffure la plus ridicule ? Tout repose sur la facilité d’un voyage dans le temps, et le fan service pesant permet de renvoyer à Back to the future, pour mieux le disqualifier et faire pire, en répétant plusieurs des autres films du MCU et en remettant en cause la puissance des Pierres, que n’importe quel héros peut désormais porter même rassemblées. Tout aboutit à un combat monstre et abstrus, où chacun n’en a pas moins son petit moment, du très petit pour un Strange qui ne parvient toujours pas à être indispensable, au très attendu pour un Stark qui paie ici ses onze ans de services, alors qu’une bonne utilisation du Gant aurait permis d’éviter le carnage, qui va jusqu’à tuer la totalité des ennemis sans l’ombre d’un questionnement moral. Il y a bien l’humour accoutumé, grâce à Ant-Man et surtout Thor, qui permet à Hemsworth d’exprimer ce potentiel comique découvert dans Ghostbusters, mais le propos est censé être dramatique, même si le film ne dit pas grand-chose en beaucoup de temps et finit à l’ancienne, sur les signatures des têtes de gondole comme Star Trek VI quand il s’agissait de passer la main.


Pour public averti (et très endurant, même s’il n’aura pas cette fois à attendre une séquence post-générique) : Avengers: Endgame (2019) des frères Russo (sur un scénario de Christopher Markus et Stephen McFeely, déjà coupables de la trilogie Narnia), avec la bande habituelle et ceux qui s’étaient fait porter pâles la dernière fois (la falote Brie Larson et le flegmatique Paul Rudd, ainsi que l’infortuné Jeremy Renner, étant donné cette coupe qui lui permet tout au mieux de participer au concours susnommé)


Avis publié pour la première fois sur AstéroFulgure

Adelme
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le 24 avr. 2019

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