Depuis que j'ai vu ce film hier soir, une question me taraude : comment ce film a-t-il pu rester inconnu au bataillon ?
L'énigmatique titre français y est peut-être pour quelque chose, je lui préfère son appellation anglaise : Confessions among actresses
Je n'ai vu aucun autre film réalisé par Kijû Yoshida mais cela ne saurait tarder car ce long-métrage fourmillant d'idées audacieuses m'a emballé. La composition de chaque image est faite pour être captivante, une conception du cinéma pas si éloignée de celle d'Ozu pour qui chaque plan doit être un tableau. Mais Yoshida est un cinéaste libre par rapport à son honorable aîné, et dans Confessions among actresses il ose le plan en mouvement saccadé, il ose un récit qui mêle plusieurs époques et plusieurs dimensions, des mouvements de caméra et des outils narratifs qui tiennent le spectateur en haleine tout le long du film malgré quelques confusions lorsque le montage nous fait passer d'une histoire à une autre, d'une dimension à une autre.
Pour moi c'est un film "one of a kind", et pourtant il m'a vaguement fait penser à deux autres, qui font partie des plus importants pour moi : Juliette des esprits et Opening Night, deux films qui en apparence n'ont rien à voir mais qui sont tout de même reliés par la belle place qu'occupent les héroïnes féminines. Néanmoins, ne vous attendez pas à admirer les Gena Rowlands et Giulietta Masina nippones, malheureusement les actrices de Yoshida n'ont pas leur classe, leur dignité ni leur tendresse. Ce qu’il est intéressant de voir dans Confessions among actresses, c'est que pour chaque comportement, on peut se demander s'il est celui d'une comédienne ou d'une personne; est-ce que ces femmes jouent ou est-ce que ces femmes vivent ? Ce questionnement est aussi valable pour les deux personnages masculins, l'agent et le psychanalyste, sont-ils tout à fait naturels ou sont-ils encore en train de travailler ?
Une véritable passion me lie à cette réalisation et maintenant que je m'en rends compte, je m'ordonne de me taire; je n'aimerais pas bouder votre plaisir de spectateur en vous en livrant trop sur cet improbable bijou du cinéma japonais. Voici donc trois dernières caractéristiques qui pourraient vous amener à regarder cette œuvre singulière : 1) des scènes oniriques au montage saisissant 2) Un cadrage légendaire : les personnages sont très majoritairement filmés aux bords de l'image, et parfois même coupés, ce qui est un choix très osé sur tout un long-métrage 3) Entre la quarantième et la soixante-cinquième minute du film se joue la scène de psychanalyse la plus hallucinante qu'il m'ait été donné de voir.
En espérant que vous aurez l'occasion d'approcher cet OVNI cinématographique,
A bon entendeur, salut !