Aussi délicat qu’un éléphant dans un magasin de porcelaines, Babygirl cultive le scandale, mieux se donne à voir comme intrinsèquement scandaleux. Il n’a d’intérêt que sociétal, en tant que pierre apportée à l’édifice du féminisme contemporain ou à celui du wokisme. Soit un film qui ne vaut que pour ses intentions, au passage longuement explicitées lors du « débat » proposé lors de l’avant-première Allociné – dont la motivation principale était de s’assurer de la bonne compréhension du message et, si besoin, de rectifier le tir – et illustrées par une mise en scène publicitaire, qui devient clipesque quand vient le sexe, et des dialogues tout à la fois pompeux et ridicules.
La métaphore filée de la chienne est confondante de bêtise, aussi intellectualisée puisse-t-elle paraître, et témoigne sur le plan de la narration d’une même complaisance que nous observons sur celui de la réalisation : la nudité recherchée, les rapports de domination exacerbés, une prétendue complexité de caractérisation qui sert de prétexte à l’énumération d’actions invraisemblables. Ou comment le désir sert de tremplin à la fétichisation de la violence définissant, selon la réalisatrice, la relation nécessaire entre les hommes et les femmes. Voilà les codes de la dark romance remobilisés, faisant du long métrage un avatar du piteux It Ends with us qui, roman comme adaptation au cinéma, se parait de revendications théoriques en totale opposition avec leur mise en pratique.
Nicole Kidman, remarquable comédienne, ressemble ici à Demi Moore dans le récent The Substance (Coralie Fargeat, 2024) : un corps que l’on habille et que l’on déshabille, que l’on retouche, auquel on fait prendre des poses telle une poupée de chiffon, mais qui ne dispose pas d’un espace de jeu suffisant. Une production figée par les discours : ceux qu’elle tient, ceux qu’elle rapporte, ceux qu’elle anticipe.