Le film de Cristian Mungiu donne autant à voir qu'à cacher, jouant sur la transparence des situations et des personnages autant que sur leur opacité. Et le passage de la probité apparente des uns à l'immoralité honteuse et masquée des autres ne tient finalement pas à grand chose.
Et ainsi l'objet fenêtre , qui revient sous diverses occurrences dans le scénario, en est-il le meilleur symbole.
Il y a d'abord la fenêtre de l'appartement que quelqu'un s'acharne à venir briser, à coup de jets de pierre, celui-là même qui s'attaquera plus tard au pare-brise de la voiture de Roméo. Geste qui renvoie visiblement à une histoire laissée hors-champ. Comme si quelqu'un en voulait personnellement au médecin. Rien ne nous sera explicité de cette histoire dont on ne tirera que des suppositions : est-ce l'ex.mari de Sandra (la maitresse de Roméo) jaloux ? Ou bien le fils de cette dernière, que l'on voit jeter des pierres dans le jardin public vers la fin du film ? Ou alors quelque chose de plus grave (une scène nous montre Roméo s'effondrant en larmes au bord d'une route où il s'est visiblement passé quelque chose) ? On ne saura pas. Mais se construit au fil du scénario l'idée que cet homme est entravé par une évidente culpabilité. Cette part d'ombre peut en agacer certains, mais elle donne de l'épaisseur - en tout cas une part de mystère - aux personnages.
Plus tard, il y a cette fenêtre sans tain, dans le commissariat, derrière laquelle Eliza tente de reconnaitre son agresseur. Mais la jeune fille s'en tient à son code de moralité et n'accusera pas celui qui de toute évidence arrangerait les affaires des adultes, aussi bien le flic que le père.
Le commissariat ouvre par ailleurs une fenêtre sur l'extérieur en la matière de l'écran de surveillance et du film grâce auquel Roméo découvre de la scène de l'agression. Or cette bande cache autant qu'elle révèle, dans une logique inhérente à l'ensemble du film, si bien que Roméo - et nous avec - en vient à douter de Marius, l'ami de sa fille jusqu'à l'accuser de lâcheté, transférant de façon fantasmée vers le jeune homme l’irresponsabilité réelle dont lui, le médecin, s'est rendu coupable.
Il y aussi cette belle scène nocturne où Roméo rentrant chez lui observe sa femme à travers les fenêtres d'une habitation et d'une histoire qui ne sont déjà plus les siennes depuis longtemps.
Le film est passionnant à suivre d'autant que la mise en scène s'attache par des choix de cadres (qui laissent voir ou qui cachent) et par un timing adapté (long plans au plus près des visages) à maintenir jusqu'au bout une tension qui va croissante : Eliza aura-t-elle son Bac ? Le père sera-t-il coincé pour ses manquements ? L'agresseur reconnu ?...etc
Mais justement, on pourra reprocher au film d'avoir réuni trop de motifs dramatiques en une unité de temps aussi courte : le bac d'Eliza, son agression, le jeteur de pierres, la corruption de Roméo, son infidélité qui se crispe (la maitresse enceinte) et enfin sa vieille mère qui fatigue... Sans doute, le film aurait-il gagné à s’alléger d'un ou deux de ces éléments scénaristiques. Et de nous éviter ce sentiment d'une deuxième heure s'essoufflant quelque peu.
Le film n'en reste pas moins très réussi.


Personnages/interprétation : 8/10
Mise en scène / réalisation : 8/10
Histoire/scénario : 7/10


8/10

Theloma
8
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le 2 janv. 2017

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Theloma

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