Ana est une personne attachante, qui se cherche et se construit par petites touches, et le spectateur est invité à suivre son parcours comme il pourrait regarder un peintre faire naître un tableau par ajouts successifs de couleurs. Parfois elles se mélangent, parfois le nouvel aplat vient effacer les précédents, parfois il faut gratter le surplus pour repartir de plus belle.
Un personnage central qui intrigue: physique androgyne, visage de gamine, style vestimentaire minimaliste, on a bien du mal à la définir d’un coup d’œil, et ça empêche tout préjugé parce que justement elle pourrait être tout comme son contraire, elle n’entre dans aucune case.
Plus on apprend à la connaitre et plus on se rend compte que tout chez elle suit cet anti conformisme: est-elle une voleuse? Une fille désœuvrée et pas très courageuse? Une petite-fille attentionnée? Une crevette capable de déplacer des montagnes pour ceux qu’elle aime? Une bonne amie? Une amoureuse transie? Une jeune fille décalée? Une personne ouverte sur le monde et capable de communiquer avec tous?
Ana est tout à la fois, et on imagine qu’elle est encore plus que ce que le film nous montre.
On ne peut s’empêcher de retrouver notre propre complexité dans ce personnage qui se cherche, parce que même sans avoir réellement de points communs avec elle, on a le principal: celui d’être animé par des désirs et sentiments qui nous poussent et nous font agir, réagir, vivre, pas toujours de manière rationnelle. L’impression d’être le résultat d’une multitude de chocs et rencontres.
Baden baden est un vrai petit bijou parce qu’il parle de beaucoup de choses: en une succession de moments de vie souvent insignifiants on mesure comment nos expériences nous forgent, et c’est beau.
Le tout est fait avec beaucoup d’humanité chaque nouvelle rencontre est une ouverture sur un pan de personnalité de l’héroïne.
Tous les personnages sont crédibles, on a le sentiment qu’ils vivent aussi leurs vies hors de la caméras, qu’on pourrait suivre chacun d’entre eux en ayant encore beaucoup de choses à découvrir. Les plus marquants étant la grand-mère et le meilleur ami, des personnages avec lesquels les interactions sont toujours très bien menées.
Les relations d’Ana aux autres sont portées par d’excellents dialogues qu’on suit avec délice. Le soin apporté aux échanges joue beaucoup dans le caractère authentique du film qui sonne juste même dans ses moments absurdes.
Baden Baden jongle entre des passages “avec de vrais morceaux de vie à l’intérieur” et d’autres doucement décalés qui sonnent tout aussi réels et viennent souffler un vent de légèreté bienvenu.
Pour taper aussi juste sur autant de domaines, il faut que le film soit fait avec du cœur, beaucoup, et sans doute aussi en y incluant une bonne part de vécu.
On passe un très bon moment en voyant cette jeune fille qui se bat contre des moulins, et ça nous rappelle la nécessité de se fixer des objectifs, des Baden Baden dont on ne verra peut être jamais les murs mais qui nous permettront de grandir à notre rythme, peu importe qu’on entre dans telle cas ou telle autre.