Ce film est souvent un vague souvenir de l'enfance, entrevu rapidement dans un âge ancien, une suite d'images vagues se succédant plus ou moins auxquelles on dit souvent par réflexe "Ah oui Bambi.. il est triste celui là."
Relégué au niveau de pure production pour petiots, mignonne, colorée et chantonnante, Bambi est un film embourbé dans une brume mélancolique envasé dans les miasmes de l'enfance, comme l'image triste d'un numéro de clown. Un souvenir plus ou moins nostalgique auquel on apporte plus ou moins d'importance mais sur lequel on rechigne vite à revenir en argumentant d'un énorme "Pffff... Bambi... mouais, t'as pas autre chose ? C'est déprimant quoi.. et niais nan ?"
Mais il faut revenir sur Bambi quelques années plus tard pour voir d'un oeil nouveau sa profondeur exceptionnelle. Oubliez les chansons tant décriées, et acceptez de regarder un dessin animé entre Terminator et Massacre à la Tronçonneuse. Laissez de côté les préjugés formés par les souvenirs faussés d'une réinterprétation de vos images d'enfants et profitez. Ou essayez.
Ce film est à mon sens l'un de ceux qui caractérise le mieux la "magie" des studios Disney. Une magie qui ne se situe pas forcément dans le féerique ou le "les enfants nous adorent on est merveilleux", mais une magie d'animation de dessins et de choix artistiques.
Bambi n'est pas un simple dessin animé, c'est une oeuvre à part entière d'une dimension picturale exceptionnelle. Une réelle suite de tableaux en mouvement, tendant parfois vers l'expressionnisme, passant de la douceur au brutal au rythme des violons et des cuivres. Bambi gère avec une habileté touchant au génie pur (merci à Milt Kahl, un des plus grands artistes animateur de tous les temps) une animation qui grave dans chaque geste tracé la marque d'une sensibilité artistique exceptionnelle et une capacité d'observation purement virtuose.
Bambi n'est pas qu'un simple dessin animé, et ce n'est pas non plus un Disney parmi tant d'autres. C'est une petite perle qui ne laisse jamais vraiment indifférent, dans quelque sens que ce soit. Un petit joyaux qui en 1h10 à peine renferme la sensibilité et le génie d'observation et de mise en scène de quelques hommes ayant passé tant d'heures à observer ce que l'on sait tous être un faon, un lapin ou un hibou pour tracer d'une poignée de lignes quelque chose qu'on pourrait appeler l'essence de chaque instant, ou même bout d'instant, chaque éclat de vie représenté. Tracé avec une émouvante justesse. Et la réussite est plus qu'incroyable car vie il y a réellement dans ces dessins.