Viens de revoir ce "petit" film de Godard... Toujours cet art du dialogue (depuis A bout de Souffle, on le savait) et puis il y a ces trois personnages qui ne semblent pas convenir à l'histoire qui les lie et c'est là le miracle du film. Cet "artificialité" (au vu d'un cinéma dit classique qui cherche une certaine forme de cohésion) débouche sur une vérité supérieure, celle de l'art, de l'acteur, du réalisateur, celle du double et celle du spectateur qui a le double plaisir de croire et de n'y pas croire, d'en rire et d'en pleurer et comme dirait la pub 3 produits en 1 et même plus :
Un film de petits gangsters + un roman + une jeune fille romantique ou surréaliste + Aragon + etc... +
L'art du raccourci (le cours d'anglais), du geste d'acteur (Sami Frey dans l'escalier), de la réplique donc (par ex., "Ah ils font schier la Ville de Paris avec leurs plaques d'égout), de la citation (Billy the Kid ou autres...), de la lumière (un Paris de cendres grises et refroidies). On n'en finirait pas d'énumérer les perles qui égrènent ce film : du jeu de mot presque minable "air con, R8" utilisé comme arme à la grâce d'un pas de trois, Godard donne l'impression de voguer dans le cinéma avec la liberté et la classe d'un cygne en utilisant ce qu'il faut au moment où il faut, sans préambules inutiles et avec une tendresse énorme 'C'est Shell que j'aime' ou 'le grand oiseau des légendes indiennes'...
Une générosité qui manque terriblement aujourd'hui.


Pour revenir sur l'art du dialogue chez Godard, il s'agit d'une oreille spéciale capable de capter notre langage dans sa quotidienneté la plus dénuée d'"art" et d'une autre capacité spéciale capable de transformer cette quotidienneté (ne serait-ce qu'en la reproduisant simplement mais donnée à entendre autrement, par ex. "Bravo Mr Segalot, ça c'est du meuble") en rythme, slogan, en un mot "poésie".
Cette quotidienneté et cette poésie ensemble infuse tous les personnages de Bande à Part, leur donne une signature d'une extrême vigueur qui n'a plus besoin des clichés du genre pour créer ses personnages. La fiction devient comme un mythe sur lequel vibre leurs frêles existences, souvent menacées d'ailleurs par ce mythe même, une tragédie les précédant.


Revu 04.01.2018

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le 2 oct. 2015

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JM2LA

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