Film masculin au possible, proche de la grossièreté souvent et pourtant porté par la grâce du jeu...
Cavalier réussit un pari unique, celui d'une collaboration étroite avec ses acteurs qui, si mes souvenirs sont bons, sont devenus de quasi auteurs sur ce film et un pari osé: celui d'une crudité alors (et peut-être encore) rare au cinéma, Eustache et quelques autres mis à part.
Crudité parfaitement assumée par un Étienne Chicot dont la part dans ce film n'est pas mince, en plus d'égrener de très belles notes de guitare en guise de conclusion.
L'histoire: quatre hommes, tous en délicatesse avec des femmes d'une manière ou d'une autre, vont se retrouver à traverser la France du Nord au Sud pour délivrer une "grosse" voiture à un vieux "con".
On croit souvent que c'est le jeu qui prime et puis on se rencontre que le scénario avance en cachette. On croit que c'est alors l'habileté à faire avancer un scénario et inventer des situations de traverse et c'est la mise en scène qui nous émerveille en cachette.
Le Plein de Super est un régal parce qu'il sait être humble lorsqu'il est grand, drôle lorsqu'il est tragique, cru lorsqu'il est délicat et que chaque scène avance sans préjugé de l'avenir et libérée de clichés, toujours surprenante et vivante.
Cavalier est souvent à distance (apparition de Chicot avec son beau-père, Klouk et sa femme, la prostitution dans la chambre d'hôtel) et cette distance surgit grâce au son comme un voleur, comme un fond de tableau agité sur un sujet tranquille. C'est la fragilité de ces machos qui est donnée avec pudeur mais netteté et qui va lier leur expérience ensemble sans faux semblant et avec force.
Pour ne rien gâter, un des fous rires les plus réussis du cinéma. Et surtout un film habité par le désir de faire du cinéma autrement, avec d'autres rapports, d'autres ambitions, d'autres vues sur la façon de rendre notre humanité avec ce miroir