Bande à part
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J'avais découvert Céline Sciamma un peu par hasard via son Tomboy qui m’avait vraiment plu et marqué par son authenticité. Une petite bouffée d’air frais qui avait injustement suscité la polémique en plein débat sur la théorie du genre. Mais bon, faut pas non plus demander aux idiots de voir un film avant de faire des jugements à l'emporte-pièce dessus... Et bizarrement Bande de filles avait provoqué également un tollé complètement débile sur le fait que ça fasse de la propagande sur la mixité culturelle, blabla... Voire même que ça fasse le jeu du Front National en filmant des racailles de banlieue. Des points de vue différents pour, une fois encore, dire des âneries sur le film de la malheureuse Sciamma qui propose pourtant un cinéma beau, sincère et sans prétention. Bref n'épiloguons pas là-dessus et concentrons-nous sur le cinéma, ce film méritant qu'on en parle en bien au vu de ses qualités nombreuses.
On pouvait toutefois craindre une vision très "6ème arrondissement" de la banlieue mais Sciamma ne tombe fort heureusement pas dans le piège du raccourci facile. On assiste alors au portrait sans fards de cette banlieue parisienne à travers la vie d'une fille de 16 ans, Vic. La réalisatrice pose un regard plein de tendresse sur l'univers de ce personnage et de la bande de filles qu'elle rejoindra pour tenter de donner un autre sens à sa vie, une autre dimension à son identité. On assiste alors à son quotidien entre sa situation scolaire délicate, sa situation familiale compliquée, ses amours et le réconfort apporté par sa nouvelle bande d'amies. Ce qui est bien d'ailleurs dans ces (bons) films qui s'ancrent dans le quotidien, ce sont les illustrations d'instants de vie, de bonheur éphémère, de tristesse passagère. A la manière d'un Tomboy, les tranches de vie s'enchaînent de façon très fluide et naturelle. Sciamma a le don de capter ces petits instants qui ne représentent pas forcément grand chose (Vic qui s'amuse avec sa soeur, qui échange un sourire avec une amie) mais dont la simplicité fait toute la beauté. Et c'est comme ça que le film fonctionne, en captant le réel, en filmant le vrai (donc le beau).
Après le film n'est pas forcément exempt de tout reproche. Le dernier tiers (qui correspond à l'éloignement de Vic) est un peu plus maladroit, il marque une rupture avec ce quotidien complexe mais beau qui faisait toute la force du métrage. A ce moment là on avance plutôt dans une situation sordide, un poil exagérée, qui verse dans un sociologisme traité jusque là en filigrane, dilué dans le portrait de cette bande de filles. Après ce n'est pas mauvais mais cette cassure rend l'ensemble légèrement bancal. Mais le film contient tellement d'instants de grâce, de moments drôles et émouvants que je n'en tiens pas rigueur. La scène de la danse sous Rihanna est juste inouïe de beauté, elle est la parfaite illustration de toute la tendresse que Sciamma éprouve pour ses personnages et de la force du lien qui les unit. Arriver à faire du beau avec Rihanna c'est fort quand même, bien que Korine y soit parvenu avec du Britney Spears sur son dernier film. En tout cas ce Bande de Filles est une oeuvre rafraîchissante, pleine de vie et qui ne se casse pas les dents sur un portait éculé et manichéen de la banlieue. Un beau film, aussi simple que touchant.
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Créée
le 13 mars 2015
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