Après la rétrocession de Hong Kong à la Chine en 1997, beaucoup de professionnels du cinéma se sont exilés aux USA avec plus ou moins de bonheur. Les frères Pang eux, ont préféré déménager en Thaïlande. Et ils ont eu raison ! Leurs films thaïlandais leurs ont apportés la gloire leurs permettant le ticket retour à Hong Kong, surtout grâce au film d’épouvante The Eye qui les a révélés mondialement. Avant cela il y avait déjà eu Bangkok Dangerous qui dévoilait tout leur potentiel. Le sujet du film est vu et revu, c’est quelque chose qui fait parti de la mémoire mondiale : le tueur à gage sans morale qui cherche la rédemption. Partant de ce principe de base les réalisateurs ont choisis pour renouveler le thème d’en faire un film totalement expérimental. Le résultat est à la croisée du The Killer de John Woo et Les Anges Déchus de Wong Kar-Wai, certaines situations y ressemblent à s’y méprendre : l’amie du héros qui donne ses contrats comme Michelle Reis, son handicap à lui qui est sourd et muet n’est pas sans rappeler la cécité de Sally Yeh.
La Thaïlande décrite par les frères Pang est très loin des cartes postales idylliques. Ici tout est sombre, violent, sans concessions, et tous nos repères en sont chamboulés. Le héros vit dans un monde sans bien ni mal, son handicap lui ayant valut d’être brimé de toute part, sauf par les être les plus improbables qui soient : un couple exécutant des contrats pour la mafia qui le prennent sous leur aile après avoir vu son don pour le tir. Pour appuyer le handicap du héros le film est très avare en dialogue, tout passe par le visuel, et inutile de dire que les réalisateurs en mettent plein la vue, le film regorge d’effets, de ralentis, de cadrages biscornus. Certains sont un peu gratuits, mais d’autres font mouche nous transportant dans le monde du héros de la réalité distordu. Un héros qui ne cherche pas vraiment la rédemption, puisqu’il ne sait même pas que ce qu’il fait est mal, il ne le comprendra vraiment qu’à la fin, malgré ses actes il reste pur, métaphorisé par sa rencontre avec une jeune pharmacienne.
En somme Bangkok Dangerous se situe tout droit dans la lignée des films noirs hong kongais à l’intrigue simple et déjà vu, mais sublimé par son coté expérimental à la maîtrise formelle proche des plus grands.
Originellement publiée sur Artzone Chronicles