On retrouve ici tout ce qui dans le 1er Banlieue 13 était déjà d'un mauvais goût exemplaire, de par la connerie indicible de son script (et un talent certain pour plagier les idées de John Carpenter tout en les rendant stupides), sa philosophie politique de bar à chicha, le cabotinage démentiel de son casting, la réal clipesque insupportable, et autres scories typiques des bessonades ordinaires: les personnages tous intégralement cons comme des gorilles en rut, les femmes qui y sont soit à poil soit ligotées soit les 2 à la fois, la bande-son pachydermique, l'humour bas du caleçon, les flics cons comme des légionnaires d'Astérix, la ringardise de son jeunisme racoleur d'autant plus ridicule que ce qui est racoleur dans les années 2000 ne l'est plus du tout 10 ou 20 ans après (genre les nanas en cuir qui font du kung-fu, pitié quoi). On est dans la lignée de ces produits Europacorp torchés par des sbires de Besson issus de la pub ou du clip, et dont la carrière au cinéma dépasse rarement une paire de films.
Ce qui est tordant, c'est que le racolage va ici tellement loin qu'il pourrait réconcilier tous les bords sous le même signe d'une démagogie tous azimuts.
- d'un côté pour nos amis de gauche c'est le film de bandeur de cité ultime, un rêve mouillé de David Guiraud, le clientélisme communautaire à toute barre, un script aussi con qu'une interview de Kalash Criminel mais beaucoup moins fendard qu'un couplet de Kaaris, un long clip de 1h40 où les seules valeurs qui vaillent sont la moula le cul et la dope. Les pauvres banlieusards sont en fait des entrepreneurs opiniâtres ghettoïsés par un gouvernement cynique qui prévoyait déjà d'ailleurs de les génocider à l'arme nucléaire dans le 1er opus -rien que ça. Mais en fait, la banlieue 13 c'est aussi la liberté tu comprends. Tout ça filmé comme un clip de rap poisseux avec une bande-son assourdissante du même acabit.
- de l'autre pour nos amis de droite on y présente la b13 comme une zone de barbarie et de non-droit malgré les centaines de millions d'euros qui y ont été déversés. Elle ne déparerait pas dans un clip de campagne de Reconquête. C'est un Mogadiscio sans foi ni loi où l'on serait bien en peine de dénicher une personne caucasienne et/ou sans casier judiciaire, et où il est plus facile de trouver une arme de guerre qu'une baguette de pain.
L'aspect buddy movie est d'un 1er degré attérant. Aucune réplique mémorable. Cyril Raffaeli est certes un excellent artiste martial et chorégraphe, mais c'est aussi un acteur douteux, un Jason Statham-like qui mordille toutes ses répliques mâchoires serrées et trapèzes contractés comme s'il allait mettre son poing dans la gueule de son interlocuteur à tout moment. Quand à David Belle, le fondateur du parkour n'est clairement pas un acteur non plus.
Vous voyez la vieille pub anti piratage "le piratage c'est du VOL" avec sa musique anxiogène, son montage agressif et ses filtres couleur bizarres? Imaginez ça pendant 1h40 et vous aurez une idée de la mise en scène. Quelques scènes de fight et de parkour histoire de dire, mais elles sont malheureusement gâchées et rendues illisibles car le réal s'échine à faire en 10 plans caméra à l'épaule ce qu'un Yuen Woo Ping ou un Sammo Hung aurait fait en 1 travelling.
Jusqu'à la 35eme minute environ il n'y a pas de scénario. On se borne à nous montrer une mission random de Raffaelli juste pour appuyer que l'état n'intervient plus en b13 sauf lorsqu'il s'agit de récupérer un authentique Van Gogh dérobé par une triade chinoise.
Enfin, une intrigue s'esquisse. Un mystérieux service secret, le DISS, commet une opération faux-drapeau pour faire croire que des gangsters ont tué des flics, déclenchant ainsi un embryon de guerre civile. En fait c'est exactement le même pitch que le 1er film: un complot dont le but est de convaincre le président d'évacuer la b13 pour la raser à coups de frappes aériennes (vous êtes prévenus c'est vraiment un film de teubés), cette fois-ci pour y construire un complexe immobilier gentrifié.
Le 1er opus n'allait visiblement pas assez loin dans le communautarisme crasse. Le monde de B13 Ultimatum se divise donc en 4 catégories de personnes: la triade chinoise qui manie le katana et la natte-rasoir custom (sans déconner), le gang de fondamentalistes musulmans sapés comme au 8eme siècle, le gang de seigneurs de guerre africains rois de la machette, et le gang de blancs néo-nazis. Mais tout ce beau monde va (en l'espace de 3 répliques, hein) dépasser leurs préjugés et leurs différences, puis unir leurs forces pour empêcher la destruction de la b13. Y a des films où on compte les morts, d'autres où on compte les faux-raccords, là on compte les clichés ethniques et tous les moments où le scénariste s'est dit "oooh ça va, ça passe" -genre, l'évacuation de 1 à 2 millions de personnes en plein Paris en 24h ne semble poser problème à personne à aucun moment du film.
Mais attention, et c'est le moment le plus drôle du film; tous ces gangs sanguinaires armés jusqu'aux dents ont une valeur en commun: la famille, évidemment. Et c'est d'ailleurs le mot de la fin. Sans déconner. Les trafiquants de drogue qui dans le film précédent ont dérobé une bombe nucléaire et qui dans les 20mn précédentes de cet opus ont explosé un commissariat au bazooka pour venger la mort d'un délinquant, étaient en fait des gentils. Qui aurait pu prédire?
Le méchant occis après un sempiternel face à face avec prise d'otages bouclier humain et tactiques fomentées dans d'interminables et non moins sempiternels couloirs d'aération, v'la la tirade finale du président: "je vous remercie, la France vous doit beaucoup"... blablabla et des propos d'une crétinerie hilarante sur la nécessité d'avoir des espaces verts dans une future banlieue qui sera plus propre et meilleure à vivre (toujours sous le regard inquisiteur des gangsters armés jusqu'aux dents qui jusqu'ici ne s'intéressaient comme dit ci-dessus, qu'à la moula, au cul et à la dope). Damien suggère que finalement, détruire ces tours pourries pour y construire du neuf n'est pas une si mauvaise idée. Le président s'exécute. On se demande bien pourquoi le complot de base était alors une mauvaise idée! Hebété, je crois que c'est la 1ere fois que je vois un film admettre à ce point la bêtise de son scénario en exécutant quand même le plan du méchant à la fin. Quand je vous dit que ce film racole tout le monde en même temps...
Et surtout, vive la diversité et les forces de l'ordre. Et les drifts en Audi dans les couloirs du 36 quai des orfèvres -oui, c'est aussi dans le film.