« Now look girls. Be realistic. None of us hardly know another. Basically, strangers to each other. Heh, we've passed one night, and we ???? met in a bar. Be realistic, there's no way, there's no reality ???? of this »
Dans un bar il y n'a de cristallisé que le verre, tant que le pilier ne l'enfonce pas dans la lentille du pilier voisin. Le glaçon même est plus ordonné que nous, bien qu'on se rassure de le voir fondre. Ce n'est pas une question de temps, c'est une question d'ordre. Ou plutôt de désordre.
J'ai regardé ce film avec des sous-titres particulièrement distracting. Beaucoup de fautes de syntaxes, en genres et en nombres, et très régulièrement des points d'interrogation... abandons totalement assumés du sous-titreur, qui résonnaient tellement avec le film et ses propos d'ivrognes. C'en était comique.
Cet homme, Chinasky, veut ne rien vouloir. Et ça dans notre monde, c'est un travail de tous les jours. Les places comme les bouteilles, ne sont pas rares au Valhalla des allumés, mais sont chères, et lui-même le reconnaît :
« Cette chose sur moi, comme une fleur et une fête. Cette chose sur moi, rampe comme un serpent. Ce n'est pas la mort, mais mourir stopperait son pouvoir. Et comme mes mains lâchent le dernier désespéré stylo. Dans cette chambre bon marché. Ils me trouveront ici. Je n'ai jamais su mon nom, mon sens. Je connais le trésor de ma fuite. »
(Il aurait été peut-être plus respectueux, de ma part envers Bukowski, de reprendre la citation en anglais... mais moins respectueux pour mon sous-titreur anonyme... qui semble lui aussi avoir bel et bien tout donné)
Cette chose sur lui, selon moi, c'est le désir d'un sens. L'égo peut être même. Et s'en défendre, clairement, faut le vouloir.
Il le dit lui-même, c'est une question d'endurance, avant que la nature le rappelle au désir de sens. Avant qu'elle le rappelle à l'ordre. La lucidité, hors de l'ordre, c'est un sport. Épuisant.
En solitaire insurmontable, heureusement qu'il y a l'amour et les bagarres.
Le quasi-nihilisme (ce mot valise est absurde) d'Henry, c'est une passion contre la nature humaine, elle qui aspire au landau. C'est une fascination pour la nature sauvage, je pense. L'autodestruction semble être l'arme de Henri, dans le jeu des égos qu'on baillone dans la fuite. C'est son arme pour vaincre la confrontation des choix de vie... peut-être est-ce la recherche d'ataraxie. Le calme de l'âme dans la soumission du corps. L'absence de tonalité. C'est un cadre. L'écriture aussi, comme une soupape. Un petit laché d'ego, pour se vider l'âme. Car écrire tout ce qu'il craint, chez les autres et chez soi, c'est déjà s'affirmer, au moins face à soi. Même dans la fuite.
CITATION (rajoutée au fil du temps)
« On dirait que la matière, jalouse de la vie, s'emploie à l'épier pour trouver ses points faibles et pour la punir de ses initiatives et de ses trahisons. C'est que la vie n'est vie que par infidélité à la matière. »
« Je disais l'autre jour à un ami que, tout en ne croyant plus à l'écriture, je ne voudrais pas y renoncer, que travailler était une illusion défendable et qu'après avoir gribouillé une page ou seulement une phrase, j'avais toujours envie de siffler »
-Cioran, toujours Cioran, pour parler des écrivains paumés-
« Le Docteur Institoris était – bonté divine ! Dira-t-on – un homme de la renaissance jusqu'à la moelle des os et Inès rôde très nettement une fille de la morale pessimiste. Elle n'avait aucune sympathie pour le monde « fumant de sang et de beauté » et quant à la vie, elle cherchait précisément à se protéger contre ses assauts par un mariage bourgeois, distingué, matériellement bien capitonnés et, dans la mesure où cela se pouvait, susceptible de lui épargner les heurts. Ironie du sort, l'homme – ou l'homoncule – qui semblait lui offrir ce refuge était l'enthousiaste d'une belle perversité et des empoisonnements à l'italienne.
[…]
Ainsi Institoris soutenait que seuls les hommes aux instincts forts et brutaux étaient capables de créer de grandes œuvres. Inès protestait : les plus belles créations de l'art étaient du à des natures très chrétiennes, tourmentées par leur conscience, affinées par la souffrance et sombres dans la vie. Ces thèses contradictoires me semblaient oiseuses et influencées par l'époque. Elles ne rendaient pas justice à la réalité, à l'équilibre (rarement atteint et toujours précaire) de vitalité et d'infirmité dont se compose manifestement le génie ; mais ici, l'une des parties défendait ce qui constituait son essence propre, la morbidité de la vie, et l'autre ce qui était l'objet de son adoration, à savoir la force, et il fallait les laisser dire. » Le Docteur Faustus - Thomas Mann