Barry Lindon offre un dépaysement certain dans l'Europe du XVIIIe siècle parfaitement retranscrite en images, et les aventures mouvementées, picaresques, du héros en font un film assez accessible, malgré une durée de près de trois heures. Mais le film induit une grande distance avec le spectateur, un manque d'émotions, de psychologie, de présence des personnages. On dirait presque des marionnettes ! On pourrait arguer que c'est pour nous les rendre antipathiques, mais c'est de l'indifférence plutôt que de l'empathie ou de l'antipathie qui est provoquée ici. La voix hors champ n'aide pas, évidemment : tout est comme raconté à la troisième personne. Mais même au-delà de ça, c'est un rythme particulier, une façon de filmer, quelque chose dans les dialogues, bref la marque de fabrique de Kubrick, qui fait de la plupart de ses films une corvée à voir jusqu'au bout.
Mais la matière première du film, à savoir un roman du britannique William Thackeray sorti en 1844, est d'excellente facture. On suit la grandeur et la décadence du personnage principal comme si on lisait le roman. La scène du duel final est un exemple de maîtrise scénaristique parfaite, si loin des histoires hollywoodiennes habituelles. Un suspense à couper au couteau, et en aucune manière racoleur, comme c'est trop souvent le cas.
Finalement, Barry Lyndon se rapproche d'un vieux documentaire sur cette époque, gâché par les manies d'un réalisateur-chirurgien, qui, tout à sa grande œuvre, oublie d'inclure le spectateur dans son aventure.