Couvert de récompenses par Polanski lors du Festival de Cannes en 1991, Barton Fink représente encore à ce jour l'oeuvre la plus personnelle des frères Coen. L'idée leur était venue lors de l'écriture de Miller's Crossing, leur film précédent, qu'ils ont eu bien du mal à terminer. Ils ont alors décidé d'écrire sur la détresse du l'auteur face à la page blanche, du manque d'inspiration d'une personne pourtant brillante lorsqu'un sujet lui est imposé.
D'entrée, on aime relativement peu Barton Fink (le personnage). Par sa gestuelle, sa façon de parler, les mots qu'il utilise, il semble mépriser les gens qui l'entourent. Il balaye d'un revers de main les critiques positives tout en se plaçant au-dessus des autres. Il les traite avec condescendance, en premier lieu son voisin de chambre qu'il qualifie sans détour d'homme du peuple, de personne banale. Il est asocial et pourtant il supporte mal la solitude car il aime s'entendre parler. Il est ravi des visites de Charlie, mais les dialogues sont plutôt des monologues de Fink qui n'écoute qu'à moitié son interlocuteur.
Le film peut être qualifié de 'mindfuck'. En effet, Barton Fink sombre peu à peu dans le délire à cause du stress qu'il endure entre les deadlines et son manque d'inspiration. Aussi, alors qu'un événement inhabituel a lieu, on en vient à se demander s'il n'est pas le fruit de l'imagination de Fink et la limite entre vrai et faux devient difficile à déterminer. Le jeu des acteurs y est pour beaucoup, en particulier Goodman qui joue un voisin imprévisible, dont la sympathie est suspecte et la colère terrifiante.
Côté casting justement, Turturro et Goodman peuvent remercier les frères Coen (et inversement). Turturro a là le rôle de sa vie, sans aucun doute. Idem pour Goodman, qui doit avoir le meilleur rôle de sa carrière avec celui de Walter dans The Big Lebowski. Les seconds rôles sont aussi très bien distribués et apportent généralement une touche d'humour bienvenue.
Au passage, les frères Coen adresse une critique acerbe au monde hollywoodien qu'ils accusent de tuer la créativité. Les scénaristes, pour répondre aux impératifs, sont pressés et doivent rester simples malgré eux. Ce côté est symbolisé par la mise en scène avec d'une part Fink qui prend son temps et choisit ses mots, et de l'autre les producteurs ou employeurs dont le débit de parole dépasse la raison. Ils vont tellement vite que Barton Fink n'a même pas le temps d'entamer son café lors de l'entrevue.
Barton Fink est toutefois, et c'est sa volonté, un film frustrant. Tout est fait pour nous mettre à la place de cet écrivain qui ne peut écrire. Le film est parfois obscur; on aimerait comprendre davantage et surtout, savoir ce qu'il y a dans cette p***** de boite !!!