C'est dans un Gotham City qui gronde, corrompu et dont les habitants vivent dans la peur que nous emmène Tim Burton, s'emparant ainsi du mythe de l'homme chauve-souris, et se l'appropriant totalement.
Il nous entraîne dans un fantastique et nocturne Gotham pour nous faire suivre un combat pour la justice et donc contre le Joker. Bénéficiant d'un bon scénario, c'est avant tout une loufoque et passionnante galerie de personnage qu'il met en scène, où un mélancolique et assez ordinaire Bruce Wayne devra partager l'écran avec son alter ego assez froid et violent, mais aussi un fabuleux et pitre Joker, et ce dès sa création ou la jolie Vicki Vale. Tim Burton n'en néglige aucun, l'écriture est simple mais remplie de bonnes idées, ce qu'on retrouve aussi dans les dialogues, et chacun apporte sa pierre à l'édifice Burtonnien.
On retrouve dans ce Batman un choc entre plusieurs genres, que soit des touches de romantisme, du burlesque, une pincée de fun ou une forte intensité dans les moments adéquats, et il y a une vraie osmose entre tout cela. Les joutes verbales sont mémorables, en témoigne la fantastique rencontre entre Wayne et le Joker, et on trouve aussi des prémices de questionnements politiques, ainsi que sur la figure du Batman, son rôle et la vision des gens, même si ce n'est pas la priorité de Burton, préférant plutôt dénoncé la cupidité humaine, sa vanité et son attachement à du superficiel, et il le fait via le Joker et ses actes.
Enfin, le plus important, ou presque, dans ce Batman est l'atmosphère mise en place. C'est gothique, sombre et quasiment irréaliste, on retrouve tout l'univers de Tim Burton et la confrontation avec celui du chevalier noir donne un résultat sublime. Tout cela est magnifié par de somptueux et grandiloquents décors, un esthétisme sombre tiré de l'expressionnisme, contribuant à rendre plusieurs séquences mémorables. On notera aussi la géniale partition signée Danny Elfman (ainsi que les participations de Prince) tandis que les comédiens se montrent tous à la hauteur, que ce soit l'attachant Michael Keaton qui humanise un romantique Bruce Wayne tout en donnant une vraie froideur à Batman et bien évidemment Jack Nicholson dont la démesure et les excès ne sont que jouissifs. Les seconds rôles ne déméritent pas, que ce soit Kim Basinger, Pat Hingle, Billy Dee William ou Michael Gough.
Lorsque Tim Burton s'empare de Batman, il nous transporte dans son univers gothique, expressionniste, sombre, torturé mais aussi assez fun et jouissif, et la rencontre entre ces deux mondes est parfaite et alchimique, et on le doit aussi à des personnages consistants et passionnants, ainsi qu'un sens de la démesure d'un cinéaste qui laisse exprimer sa créativité.