Bon, on est d’accord que c’est tirer sur le corbillard que de s’attaquer aujourd’hui à Batman Forever, vu la réputation qu’on lui connaît. Il serait aussi un peu malhonnête de ne pas reconnaître toute l’affection que je lui portais dans ma jeunesse, vu qu’il passait avant les Burtons à l’époque. Il a fallut que je rachète le monstre en coffret double dvd (avec Batman & Robin, tant qu’à faire) pour la réévaluation, et je n’ai pas été déçu. Le film ne fait pas dans la demi mesure, transformant le Gotham gothique en boîte de nuit flashie dont les éclairages complètement fantaisistes (même pas cachés, on voit les projecteurs dans le cadre) contribuent à donner l’aspect carnavalesque de l’ensemble. Car il s’agit bien d’un carnaval, chacun essayant de cabotiner plus que l’autre. Rarement des méchants auront autant voulu imiter le Joker sans en avoir l’ampleur, et il convient de noter qu’il s’agit d’une des pires performances de Tommy Lee Jones, complètement à côté de la plaque de son personnage (les explications à son sujet sont expédiées : il s’est pris de l’acide dans la gueule donc il est fou). Quant à Jim Carrey… il fait du Jim Carrey. Il est toutefois amusant de connaître les circonstances de son recrutement, qui remontent au premier Batman. A l’époque, Nicholson hésitait à endosser le rôle du Joker, donc pour lui forcer un peu la main, la production avait également proposé le rôle à Robin Williams. Nicholson avait alors accepté et Robin avait protesté devant ce tour de cochon. Avec Batman 3, les producteurs se sont à nouveau tournés vers Robin. Ce dernier leur a demandé des excuses. Jim Carrey a donc récupéré le rôle, et Robin mon soutien quand j’ai appris l’anecdote. Quelques trucs attachants ça et là quand même, à l’image du message subversif tellement énorme sur la télévision qu’il fera rire tout le monde (en créant au passage d’hideuses visions vertes d’un goût assez douteux). La télévision, c’est mal. Dans le bon, notons toutefois les flashs backs concernant l’enfance de Bruce Wayne, qui sont réussis et icônique comme il le fallait. Bruce Wayne, bien qu’insipide, n’est pas vraiment raté.
J’en viens maintenant à la partie divertissante de la chronique, à savoir la relecture crypto-gay du film. Tout le monde la sent, mais je pense que Schumacher (dont nous connaissons les inflexions sentimentales) en a beaucoup rajouté dans cet opus, la suite se révélant plus light à ce sujet. Ca passe essentiellement par Robin, et surtout par sa dégaine. Belle gueule, énorme boucle d’oreille unique qu’on ne peut pas ne pas la voir, c’est un stéréotype connoté mais bon, on ne va pas oser le dire. En faisant le ratio du temps que Bruce et Robin passe ensemble, et celui que Bruce passe avec la docteur soit disant sa copine, on note une légère préférence pour le jeunot aux cheveux courts. Mais cela explose surtout pendant quelques scènes précises, type Robin qui a revêtu son costume, et dont les paroles « je voudrais être à tes côtés » prennent des accents assez facilement détournables. Si on rajoute la poignée de main virile qui suit et les premiers plans téton-cul d’armure en latex, le doute n’est plus permis. Et le cliffhanger, où Bruce doit choisir entre Robin et la docteur. Difficile de se retenir de rire tant les intentions sont évidentes, et la séquences de chute va donc délivrer une réponse sur la validité de cette grille de lecture. La scène est plus subtile que prévue, puisque Batman sauve D’ABORD la femme, puis la laisse en l’attachant à un fil d’acier (la réception a dû être agréable ainsi que les chocs contre les parois du puit) et réceptionne Robin en lui faisant faire un atterrissage en douceur doublé d’un câlin évident. On peut donc débattre, mais mon avis est fait (la docteur n’est qu’un paravent, le dernier plan est éloquent sur la figure de couple dominante). Dois-je en rajouter sur le couple Double-face/l’homme mystère ? En fonctionnant avec les bons gros clichés, Gotham s’éclaire sous un jour nouveau, assez amusant d’ailleurs quand on connaît les intentions familiales de départ. Encore un complot sodomite pour pervertir la jeunesse…
Voracinéphile
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le 6 mars 2014

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