Brooklyn, l’été, la canicule, et Manhattan au loin, flou dans les brumes de chaleur. Entre glande avec ses potes, feux d’artifice à Coney Island et une nouvelle petite copine, Frankie se morfond. Il tourne en rond, prend de la drogue, des médicaments qui le shootent, le font aller un peu mieux, oublier tout. À la maison rien n’est rose, rien n’est très enviable : son père est mourant, à l’agonie dans le salon, sa mère s’inquiète pour lui et sa petite sœur l’indiffère. Et puis Frankie se cherche aussi, cherche ce qu’il préfère, qui embrasser, qui prendre dans ses bras, draguant sur Internet des hommes mûrs qu’il rencontre ensuite près de la plage, la nuit, pour quelques caresses, quelques râles ou plus.
Eliza Hittman, pour son deuxième long-métrage (après le prometteur It felt like love, chronique adolescente déjà à Brooklyn, déjà à Coney Island et déjà l’été), paraît sous l’influence constante de ses modèles dont elle ne parvient clairement pas à s’affranchir : teenager en marge à la Gus Van Sant, érotisme juvénile à la Larry Clark, ambiance cash à la Andrea Arnold. Son film en perd son identité, sa force, et le transforme en un énième drame de la jeunesse avec errance existentielle un rien photogénique et homosexualité glauque (sans oublier une agression homophobe prévisible et inutile) digne des années 80 et début 90.
Toutes les situations et tous les enjeux brillent par leur manque d’originalité. Rien ne surprend, l’ensemble fait factice même dans sa recherche de réalisme cru, de naturalisme à tout prix. Hittman n’a pas grand-chose à dire de neuf sur un bel âge qui s’ennuie ni grand-chose à en montrer, sinon des corps d’éphèbes en sueur débauchés chez Bel Ami qui s’agitent ou prennent la pose. Harris Dickinson, avec son physique de jeune premier, se défend pas mal dans ce rôle rebattu, même si son petit air triste censément sexy et sa moue boudeuse finissent par lasser. À l’image finalement de ce film qui, avant même de se révéler décevant, en oublie d’être convaincant.
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