Un pur mélodrame pour le moins singulier au regard de la filmographie de Bertrand Blier : aucunement truculent et finalement assez peu provocateur malgré son caractère amoral Beau-Père marque la troisième et dernière collaboration entre Patrick Dewaere et l'auteur des Valseuses, débarrassés le temps d'un film de l'ogre Depardieu...


Deux choses frappent à la (re)découverte de Beau-Père ; tout d'abord l'extrême sophistication de la mise en scène de Blier, dénotant étrangement avec l'aspect parfois rustre de ses précédentes réalisations. Exit les grivoiseries des Valseuses et de Calmos, terminée la noirceur braque et surréaliste de Buffet Froid : ici notre incontournable dialoguiste hexagonal laisse moins libre cours à sa verve pétulante, privilégiant une humeur davantage chagrine et mélancolique, mais toujours aussi tendre et bienveillante que par le passé. La grande précision des cadrages et des mouvements de caméra fait même parfois penser à l'âge d'or des studios américains, étayée par une bande originale des plus somptueuses ( citons entre autres choses des fulgurances de ragtime, une apparition du touchant et méconnu Maurice Risch en contrebassiste ou encore le violon lancinant de Stéphane Grappelli...). Propre et particulièrement maîtrisée la technique atteint là son apogée, apogée formelle que Bertrand Blier ne retrouvera plus jamais par la suite, excepté peut-être dans le très classieux et classique Trop Belle pour Toi.


Ensuite et enfin : l'interprétation hallucinante du regretté Patrick Dewaere, flamboyant dans le rôle-titre. Personnage de pianiste à la petite semaine, visage creusé au teint de lait évoquant celui du Mauvais Fils dirigé par Claude Sautet à la même période, loser attachant et sentimentalement un peu minable... Beau-père est un élégant festival Dewaere, à ranger aux côtés des plus belles compositions de l'acteur ( Série Noire, Coup de Tête, Préparez vos mouchoirs ! ). Le comédien sidère une fois encore par son implication totale et sa légendaire excentricité tortueuse, jouant un Rémi veuf et semi-incestueux pour le moins ambigu.


Seule ombre au tableau de ce Beau-Père plus sobre qu'exubérant : un récit qui tourne parfois un peu à vide et dans le vide, préférant jouer sur les rapports entre les différents personnages que sur un enchaînement de situations de cause à effet ( fait coutumier dans le cinéma de Blier, même dans ses meilleurs films que sont Les Valseuses ou encore Tenue de Soirée ). On a une fois encore le sentiment que le réalisateur peine à boucler son métrage et/ou à recouper ses strates narratives, heureusement rehaussé par l'excellence des acteurs, des actrices ( Ariel Besse évidemment, mais également Nicole Garcia et la magnifique et rayonnante Nathalie Baye ) et des dialogues. Un très beau film.

stebbins
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le 27 mars 2018

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stebbins

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