Le pari est audacieux : adapter une pièce de Shakespeare, Beaucoup de bruit pour rien, en la transposant à l’époque actuelle et en respectant le texte originel. Il était aussi excitant quand on découvre que c’est le réalisateur américain Joss Whedon qui s’y colle, celui-là même qui signa les scénarios de Toy Story et de Alien, la résurrection et créa le personnage de Buffy devenue héroïne de série, avant de mettre en projet la série Firefly et en scène le blockbuster Avengers en 2012. Autant dire que la rencontre des deux mondes représentés par le dramaturge anglais et le spécialiste américain des comics excitait les esprits. Qui plus est, Joss Whedon optait pour le noir et blanc et choisissait pour unique décor sa propre demeure.

Tout ceci posé, le résultat final est peu convaincant. Le texte de Shakespeare est dense, écrit dans une langue vieille de quatre siècles, qui se traduit par une quantité assez impressionnante de sous-titres à lire. Notre attention dès lors est moins portée sur la mise en scène et le jeu des comédiens. La première utilise à l’envi les ressorts du décor intérieur (cuisine, salons et chambres) et extérieur (jardin) transformant de fait l’endroit en autant de scènes. Quant aux seconds, la plupart beaux jeunes gens en proie aux affres de l’amour, ils ne semblent pas toujours à l’aise avec les subtilités de dialogues alambiqués qu’ils donnent parfois le sentiment de réciter ou de déclamer avec emphase plutôt que de les incarner réellement.

Au final, l’idée audacieuse montre vite ses limites et réduit l’ambitieux dessein à une sorte de gadget clinquant qui sonne hélas le vide. Faut-il y voir l’expression d’une autodérision féroce d’illustrer sur l’ensemble du film la promesse cruelle et lucide du titre ? Il y a malheureusement à craindre que Joss Whedon qui s’avoue lui-même influencé par l’auteur de La Tempête se soit davantage pris au sérieux en envisageant une transposition qui s’avère tout à fait artificielle et incongrue et qui, pour le coup, n’apporte rien de nouveau à l’œuvre intemporelle et éternelle.
PatrickBraganti
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le 21 mars 2014

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