Préambule :

(Pour la critique du film, il faudra sauter ce premier paragraphe si cela ne vous intéresse pas.)

Voilà près d'une année que je n'ai plus écrit un billet, que ce soit ici ou ailleurs. Pas l'envie, pas l'inspiration, seulement ce vide où les mots sombrent et seules restent les idées. A vrai dire je ne pensais pas revenir écrire pour le dernier film de Tim Burton. Oh non pas que je n'étais pas curieux de découvrir cette suite au cultissime Beetlejuice, non, mais concernant la plupart des films pour lesquels ma torpeur actuelle a bien voulue, à de rares occasions se faire moins présente, ils n'étaient pas transcendants. J'ai donc bêtement pensé que ce film serait une suite sans grande ambition. Ce n'est pas que je n'aime plus écrire, bien au contraire car j'aime encore débattre et échanger sur les oeuvres que je découvre. Non c'est tout simplement que parfois les mots me font faux bond, et cela est devenu une habitude depuis bientôt quatre années. Partagé entre l'envie de revoir ce que j'ai déjà vu et un intérêt amoindri pour ce qu'il me serait possible de découvrir. Je ne sais pas encore en écrivant ces premières lignes si je vais revenir plus régulièrement à l'écrit, ni même si cette critique sera longue ou courte. J'ai un temps pensé à écrire sur des formats plus courts, je verrais bien. L'important est peut-être en fin de compte de se lancer et de voir ...

En 1988 Tim Burton, n'ayant à son actif que deux court-métrages et un premier film, nous embarquait dans son univers singulier et déjanté. La mort, l'humour, l'absurde et des gens vivants ou non, un peu paumés au milieu de tout cela. Le revoilà trente-six ans plus tard, armé de la même énergie et de la même folie. Pour mon plus grand plaisir.

Je ne m'en suis jamais caché : j'adore le cinéma de Tim Burton. Ceux qui me lisent le savent, mes proches le savent, j'ai l'intime conviction que même mon chat l'a compris et de toute façon mon avatar en ligne en témoigne. J'aime cette vision, ce style, cette patte à la fois tendre et noire, douce et piquante. Cet humour absurde, à la limite du ridicule parfois, et cet amour pour les marginaux, les freaks et les laissés pour compte. J'aime le cinéma de Burton pour ce qu'il incarne, ce qu'il inspire, ce QU'IL m'inspire et ce qu'il m'évoque chez moi. C'est bête à dire mais je me sens bien plus proche d'un personnage comme Edward par exemple que de la boulangère au coin de la rue, et c'est en partie grâce aux films de Burton que j'ai accepté ce fait. Chacun est unique, singulier, parfois repoussant ou effrayant pour l'autre, mais c'est ainsi et c'est surtout tant mieux. Quand je vois un film de Burton, c'est comme si cette petite voix qui tente sans cesse de me raisonner ou de me faire penser au pire, se décidait pour une fois à me dire "Bon alors écoute : oui tu es sûrement un peu bizarre parfois et c'est OK."


Avec Beetlejuice Beetlejuice cette maxime prend à nouveau tout son sens. Puisqu'ici même les morts restent uniques. Ils sont tous décédés de manière différente, ils ont tous fait des choix, et cela les caractérise encore. Le scénario, même s'il demeure somme toute classique, bien que très efficace, s'évertue à mettre en avant le fait que même dans la mort, cette inéluctable et ultime étape qu'il nous faudra tous franchir un jour, les gens sont ce qu'ils sont. On devient quelqu'un et on garde ça en soi apparemment. Pourquoi pas ? Après tout cet au-delà tel qu'il est présenté ici serait bien moins fun sinon, non ?

En terme de cinéma ça donne quoi ? Et bien un film assez redoutable en terme d'humour je dois dire et surtout cette impression très agréable qu'il ne s'agit pas simplement d'une suite pour une suite. Certes le film use des codes qui ont fait toute la saveur du premier opus, mais ce n'est jamais vraiment un soucis, puisqu'il s'agit plus ici de rappeler un univers et un style particulier plutôt que de refaire la même histoire. Aussi pourra-t-on dire, et bien que cela soit en vérité assez surprenant à constater : Beetlejuice Beetlejuice est une bonne suite. Pas une redit, pas un remake ni même une suite facile, c'est juste une bonne suite qui se laisse apprécier à sa juste valeur. Avec trente-six ans de plus dans le buffet, Burton garde son énergie pour servir un film inspiré, peut-être même son plus inspirant depuis sa version animée de Frankenweenie en 2012.


Danny Elfman est évidemment de la partie lui aussi pour accompagner la mise en scène et les divers gimmicks et ressorts propres à cet univers. Sa partition est d'ailleurs très convaincante, comme souvent. Elle vient à la fois rappeler l'oeuvre d'origine pour mieux l'ancrer dans cette nouvelle ère. Le ton du film est quant à lui étonnant parfois, comme si Burton ne se retenait pas et c'est tant mieux. Je me souviens que le premier film s'amusait parfois avec le politiquement correct, (on parlait quand même de marier un démon de six cent balais à une gamine de quatorze ans hein ...), mais ici j'ai trouvé l'humour parfois plus noir et surtout accompagné d'une dimension visuelle plus graphique. Cette séquence de rafistolage, voir même de réassemblage avec Delores par exemple, ou bien la présence plus pregnante du sang à l'écran notamment avec tout ce délire autour de l'affreux bébé. Difficile d'en dire plus sans spoiler, mais j'ai trouvé le film plus gore dans un sens. Attention rien de vraiment sale non plus, mais le ton est à mon humble avis, un poil plus sombre et délirant.


On retrouve avec plaisir Winona Ryder et Catherine O'Hara, ainsi que bien entendu le génial Michael Keaton qui reprend son personnage de démon farceur comme s'il l'avait quitté la veille. J'exagère peut-être un peu, l'acteur a lui aussi trente-six ans de plus, mais il s'amuse visiblement et cela transpire à l'écran, pour le plus grand bonheur du public assurément. Mais il y a aussi des petits nouveaux, et notamment Jenna Ortega qui a déjà joué pour Burton dans la série Mercredi pour la plateforme au N rouge. L'actrice s'en sort très bien, même si j'avoue que je commence peut-être à me lasser de la voir jouer la même chose régulièrement. Bien que ce constat soit surtout en lien avec des rôles précis et pas le talent de l'actrice qui lui est indéniable. Mais les ados ou jeunes adultes aux traits fermés et à l'humeur blasée pourront vite devenir redondant au bout d'un moment. Je demeure néanmoins curieux de la voir s'illustrer dans autre chose. Willem Dafoe et Justin Theroux quant à eux incarnent de nouveaux personnages, un ancien acteur connu pour avoir joué un flic pour le premier, et un opportuniste un brin cringe et délicieusement loser pour le second. La divine Monica Bellucci quant à elle, semble s'amuser, bien qu'elle soit je trouve sous-exploitée.

Alors quels sont les points plus faiblards au final ? L'écriture peut-être, qui bien qu'efficace et tout à fait suffisante pour cette suite, tend parfois à donner l'impression que certains arcs narratifs s'arrêtent brusquement, celui sur Astrid et Jeremy en est un bon exemple. En revanche je pense que le point le moins réussi du film, et cela me désole, est indéniablement celui sur Delores incarnée par Monica Bellucci. Le personnage n'a une utilité que très mineure, et bien que l'actrice s'en sorte correctement, elle n'a pas grand chose à jouer de plus que cet archétype de veuve noire. Pour être tout à fait franc, je me suis fait la réflexion en quittant mon siège, qu'elle était là parce que Burton voulait faire jouer sa compagne dans son film.

Je pense avoir fait le tour sur ce Beetlejuice Beetlejuice. Le film est imparfait c'est vrai, mais il n'en demeure pas moins sympathique et a surtout pour lui cet avantage indéniable de ne pas être qu'une suite pour une suite. Un Burton qui fait majoritairement plus de bien au moral qu'autre chose et ce n'est déjà pas si mal je trouve.

E-Stark
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le 26 sept. 2024

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