C'est entendu, 10 est une note excessive qu'on devrait réserver à quelques Bergman, Tarkovsky ou Bela Tarr. C'est sûr "Before Sunrise" est un film plein de sirop où l'on s'embrasse devant un coucher de soleil. On n'est pas toujours très loin d'entendre les antiques "chabadabada chabadabada". Et oui, le scenario pourrait être tatoué tout entier sur les hanches d'un éthiopien (on ne dira jamais assez la rigueur qu'il faut pour livrer un bon film sans un grand scénar' ni un gros budget).Et oui, en 20 ans, le créneau franco-américain de Julie Delpy a mal vieilli (à en juger par l'indigeste "2 days in New York").
Oui mais, en 1995, Julie Delpy n'a rien à envier à un ange si ce n'est peut-être son corps glabre et encore j'en sais rien, ça m'étonnerait même pas. Son partenaire Ethan Hawke n'a pas à se forcer à jouer l'amoureux. Le film en lui-même suit tout du long une trame très simple qui les amènera d'un train à l'autre (pour le coup c est pas un spoiler ne vous en faites pas). En chemin, il désamorce les clichés du genre soit en les évitant (par exemple la fameuse scène de la "Vérité Révélée" où le protagoniste d'une comédie romantique se confie à son, ou sa, pote et formule pour la première fois son amour, est ici au moins contournée) soit en les exorcisant (la scène du baiser dont je parlais tout à l'heure mais chut!).
Si l'intrigue est fine, elle repose quand même sur des péripéties toutes plutôt sympathiques, ma foi. Et puis de quoi a-t-on besoin de plus qu'un couple dans ce genre film pourvu que la rencontre soit belle? A mon sens, la niaiserie n'a pas sa place ici ou alors vraiment à la marge mais c'est vrai que je suis assez niais alors peut-être mon avis est-il biaisé. Richard Linklater a en plus le bon goût de ne pas s'en remettre uniquement à la complicité de son couple mais d'avoir aussi quelques idées en matière de réalisation et d'écriture. Before Sunrise a eu quelques enfants: Before Sunset et Before midnight. Celui-là propose une sacrée gageure: faire croire à l'usager de la RATP que je suis que l'idylle parfaite est possible à Paris, et montrer qu'on peut y tourner une comédie romantique sans verser dans la carte postale. On verra s'il y arrive.