Before Sunset
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Suite du déjà remarquable Before Sunrise, le deuxième opus de la trilogie de Richard Linklater atteint des sommets, tout en restant modeste. En effet, on retrouve tout de suite la simplicité du cinéma linklaterien, qui ne semble pas attacher une grande importance aux divers schémas du 7e Art. Ce qui importe, c’est donc la relation entre les deux personnages principaux, et rien d’autre. Le dépouillement extrême se ressent tant dans la forme que dans le fond. La caméra de l’Américain n’a d’yeux que pour ses deux protagonistes, malgré le cadre. Car même si l’on assiste à une balade dans la capitale française, peu d’attention est portée à la ville elle-même, qui cependant garde une présence discrète.
Comme Vienne dans le premier opus n’était qu’un arrière-plan d’un tableau avec deux personnes sur le devant de la scène, Paris n’a donc qu’un rôle secondaire. Car ce qui est intéressant, c’est surtout les dialogues et les visages. Bien sûr, les débats pas toujours très profonds qu’ont nos deux héros refont surface, sur des sujets multiples comme l’environnement ou le sexe. Mais comme le dit Jesse à un moment, si c’était leur dernier jour sur Terre, il ne parlerait pas de toutes ces choses – malgré leur intérêt. Il se concentrerait sur un nombre réduit de sujets, ceux qui ont le plus d’importance à ses yeux.
Ces conversations sont donc passionnantes, car d’un côté totalement normales, voire banales (nous avons les mêmes tous les jours) mais d’un autre côté très croustillantes, car n’a pas ce genre de conversation qui veut. Le sujet-même du dialogue entre Jesse et Céline n’est pas le plus important, donc, c’est surtout le fait qu’ils parlent, tout simplement, et la manière dont ils parlent. Car la caméra – plus encore que dans Before Sunrise – s’attarde subtilement sur les impressions des deux personnages. L’on peut donc apercevoir furtivement la passion dans les yeux de Ethan Hawke (toujours génial dans sa collaboration avec Linklater) et le naturel de l’actrice française. Linklater arrive donc encore une fois à rendre le quotidien exceptionnel, car il a un talent certain à se focaliser sur ce qui a un sens – les plans-séquences où la caméra précède les deux acteurs sont donc incroyables, car montrent que le cinéaste est entièrement dévoué à ses personnages, avec l’intention pure de découvrir leurs secrets au-delà des mots.
C’est là donc le génie de ce film : la capacité du réalisateur a embrasser ses personnages d’une telle manière que l’on ne fait plus qu’un avec ces derniers, oubliant tout le reste. En quelques instants seulement, il réussit à nous emporter à nouveau dans cette aventure dont on ressort – trop tôt – chamboulé. Car le fait que les deux protagonistes se revoient après 9 ans apporte un ton différent à cette suite, définitivement plus noire. Alors que les désillusions de la vie n’avaient pas lieu d’être dans le premier film, ici tout a changé (en apparence). L’un marié, l’autre en relation sérieuse, les deux ne peuvent plus avoir le même regard dénué de toute barrière. C’est pour cela que pendant la première partie du film, les deux osent dire qu’ils sont très heureux et que la vie leur apporte beaucoup, alors que, peu à peu, on découvre que ce n’était qu’un mensonge – sans doute pour faire croire à l’autre (et à soi-même) qu’ils n’ont pas commis d’erreur en ne se revoyant pas.
Mais bien sûr, la passion partagée de Jesse et Céline est intacte après tout ce temps, et les multiples regards dévorants d’amour d’Ethan Hawke démontrent à quel point cela semble évident pour ces deux de ne pas refaire la même erreur une seconde fois. La fin ouverte nous laisse d’ailleurs confus, car l’on ne sait pas si Ethan ira bien prendre son avion ou non. En fin de compte, peu importe. Comme son personnage le dit au début, le fait que les deux personnages de son livre (Céline et lui-même en fait) se retrouvent après Vienne n’était pas ce qui compte, seulement la possibilité que cela arrive. Les pessimistes diront que non, les optimistes diront que oui, tandis que les indécis espèreront simplement que c’est le cas…
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le 16 juin 2016
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