Je ne sais même pas par où commencer tellement ce film est mauvais. C'est esthétiquement si prétentieux et dans le fond si creux qu'on est obligé d'être en colère contre Branagh.
Prenons d'abord l'image : le film s'ouvre sur le survol du Belfast d'aujourd'hui. Son port, ses quartiers résidentiels, ses bâtiments d'intérêt..
On se dit qu'on n'est pas loin d'une pub pour l'office du tourisme mais on lui laisse le bénéfice du doute. Un franchissement de mur plus loin, on bascule en noir et blanc avec des images qui se veulent léchées mais qui perpetuent l'impression de film publicitaire. Un noir et blanc esthétisant, un cadre toujours -trop- travaillé, qui n'est abandonné qu'au profit de plans -trop- serrés sur les personnages. Une surenchère de belles images qui ne s'intéressent pas à leur sujet. On étouffe. Pas un plan qui ne dure plus de 3 secondes, pas une scène qui ne dure plus d'une minute. On se prend à rêver de conventionnels champ-contre champ ou d'un ou deux travelings pour se reposer de cette impression de carte postale qui, jamais, ne filme en réalité Belfast.
Le scénario ensuite. Une chronique familiale compliquée par les tensions intercommunautaires irlandaises, aux accents autobiographiques. Mais Branagh confond vitesse et précipitation. Les séquences s'enchaînent au rythme du métronome, sans supplément d'âme : les moments de joie, de détresse, ou le drame historique, tout est traité au même niveau. A aucun moment on ne prendra le temps de connaître ou comprendre ce qui tient les personnages. Et je parle là des personnages qui ont la chance d'avoir le droit à un peu d'intérêt de la part du scénario (le frère fantome dont toute la famille se fout, on en parle?).
Parce qu'il ne donne pas plus d'importance à une scène qu'à une autre, on regarde avec une relative indifférence et un profond ennui l'histoire de cette famille qui semble pourtant déchirée par le contexte religieux.
Certaines scènes sont ahurissantes - la fête qui suit l'enterrement ou le moment de tension qui suit l'émeute - et mériteraient des pages entièrs de déconstruction.
Non seulement Branagh n'arrive pas à nous raconter cette simple histoire avec le cœur, mais il veut aussi y superposer ce qui semble être la naissance de son amour pour le cinéma. Quel bloubiboulga narratif!
Alors oui, c'est joli le noir et blanc, oui, le petit garçon est mignon, oui c'était pas marrant ce contexte historique. Ca n'empêche que ce film est un navet. Un genre de Petite maison dans la prairie version Belfast (si si réfléchissez bien: les parents, les discussions sur le chemin de l'école, les scenes de classe, l'épicerie...). En tout cas, Brannagh ne m'y reprendra pas de si tôt.