Buddy est un enfant de huit ans insouciant qui vit à Belfast dans un quartier très protestant mais où beaucoup de catholiques résident… jusqu’aux événements de Belfast des années 1960, ce qui contraint sa famille, pourtant protestante, à devoir choisir un camp : celui des brutes extrémistes ou celui des exilés.
Film autobiographique de Kenneth Branagh, qui démontre qu’il est toujours très bon derrière la caméra, c’est un tel dommage qu’il n’ait pas eu un plus grand succès en salles, contrairement à certaines bouses en ce moment (comme un certain Mort sur le Nil du même gars). Pourtant, Branagh manie très bien le noir et le blanc et la couleur (qui n’apparaît que pour montrer le présent ou des souvenirs cinématographiques marquants) et sa caméra se balade à hauteur d’enfant, donnant des plans très serrés mais très beaux et cadrés énormément en contre-plongée. L’un des inconvénients de sa mise en scène est que le point n’est pas toujours fait et que, du coup, certains événements historiques ne sont pas traités.
De ce fait, on passe d’une scène très violente au début du film à une autre scène très violente vers la fin du film mais avec rien au milieu à part des extraits télévisuels. Si certains spectateurs ont donc une impression d’ennui, c’est normal bien que personnellement, je trouve qu’il y a quand même des trucs. Ce que ça dit sur l’insouciance de l’enfance, sur les souvenirs de Branagh (son déménagement en Angleterre a été un tournant de son enfance) sur Belfast, sur le conflit entre protestants et catholiques qui, par certains aspects, continuent encore aujourd’hui… c’est juste dommage que Branagh n’est pas réussi à nous donner un témoignage avec plus de souffle, plus d’épique.
J’y pense mais il y a par exemple une très courte scène où Buddy parle à ses grands-parents des problèmes financiers de ses parents : son grand-père réplique qu’il exagère probablement mais Buddy explique qu’il a le nez pour sentir ce genre de choses. Il raconte alors l’anecdote du collecteur de loyers qui vient réclamer leur loyer mensuel. On a ensuite le droit à une très courte scène visuellement très réussie où Buddy, en deux grands plans fixes, se voit saisir par sa mère et caché sous le canapé, tandis que le collecteur, ayant quand même entendu du bruit, essaye de se faire ouvrir la porte. La scène se conclue par un Buddy qui, après avoir trahi sa présence une première fois, essaye de dire qu’il n’y a personne à la maison et se fait brusquement taire par sa mère. La scène est courte, drôle, très bien filmée et en dit beaucoup sur les soucis financiers de la famille et la manière « irlandaise » de gérer les loyers et les taxes. Mais voilà, c’est trop court et beaucoup d’éléments de l’histoire ne sont pas traités avec ce même regard, ce qui est vraiment dommage.
Même tout ce qu’il dit sur la mentalité (nord-)irlandaise et leur « goût » pour l’immigration est intéressant mais encore une fois très court.
Il reste cependant le dernier gros point positif du film pour sauver l'ensemble: les acteurs, de Colin Morgan dans un petit rôle (les fans de Merlin, coucou !) à Jamie Dornan (qui démontre qu'il est un excellent acteur) en passant par Caitriona Balfe, Judi Dench et Ciarán Hinds, sont tous bufflants et excellents mais, encore une fois, je ne suis pas sûre que tout le monde va vouloir aller le voir juste pour leurs beaux yeux...
Je crains donc que beaucoup passent à côté de ce film et de sa beauté, pour, hélas, probablement encenser celui de Kenneth Branagh sorti un mois plus tôt (Mort sur le Nil dont, je le rappelle, j’ai fait la critique) et qui, pour le coup, ne mérite même pas un quart de son succès…
PS: l'affiche est l'un des pires photoshops qui m'aient été donné de voir !