Présenté aux festivals de Berlin et d'Avoriaz en 1975, Kanashimi no Belladonna est le troisième et dernier volet de la trilogie érotique Animerama produite par le grand Osamu Tezuka et la société Mushi Production, qui fermera ses portes peu de temps après la sortie du film de Eiichi Yamamoto.
Trouvant principalement sa source dans l'histoire de France (comme le montre le générique final), dans diverses formes d'art et surtout dans l'essai de Jules Michelet, La sorcière, Kanashimi no Belladonna est une oeuvre extrêmement atypique, difficile d'accès et ô combien avant-gardiste dans sa forme comme dans son propos.
Charge anti-cléricale d'une violence phénoménale, épinglant aussi bien l'Eglise qu'une société patriarcale, Kanashimi no Belladonna est un sublime portrait de femme aussi beau que tragique, inconfortable et flamboyant, ode à la femme dans toute sa puissance et sa beauté destructrice. Libertaire et franchement couillu pour l'époque, le film de Eiichi Yamamoto est un véritable uppercut émotionnel, vous laissant au tapis bien après la projection.
Délaissant le style graphique de Tezuka pour privilégier une approche plus psychédélique, proche de l'art nouveau, Kanashimi no Belladonna fait appel à une animation rudimentaire, principalement statique, qui ne conviendra clairement pas à tout le monde. Mais il convoque aussi des dessins absolument magnifiques, une forte imagerie et une originalité constante, se posant définitivement comme un modèle de narration purement visuelle et sensitive, aspect renforcé par une bande originale envoûtante.
Poème funèbre d'une puissance de feu incomparable, aussi subversif que bouleversant, Kanashimi no Belladonna est une pure oeuvre d'art à la beauté incandescente, difficile à aborder mais qui recèle en elle mille merveilles appelant de multiples niveaux de lecture. A ne surtout pas louper, d'autant que le film est resté longtemps invisible avant de bénéficier d'une magnifique restauration orchestrée par Cinelicious.