On ne peut nier que l’on trouvait ce projet extrêmement bizarre et capillotracté : faire un biopic musical sur la star de la pop Robbie Williams avec un singe en lieu et place d’un acteur pour jouer son rôle. Mais, au final, cette idée à priori saugrenue fait du sens tant le chanteur a été comparé à un primate au vu de ses excès et pitreries durant sa carrière (des singeries donc) et qu’il donne sa voie et son regard (par ses yeux) au singe du film qui l’incarne créé par la grâce d’effets spéciaux très réussis. On sait, depuis la nouvelle saga « La Planète des singes », les progrès incroyables faits en matière de reproduction simiesque et ils sont admirablement mis à profit ici. Et, pour le coup, cela permet à « Better Man » d’être probablement le meilleur et le plus surprenant biopic de chanteur ou musicien depuis celui de Baz Luhrman avec « Elvis », tant les autres sortis récemment étaient lisses, triviaux, prévisibles ou, pire, ratés. On pense notamment au catastrophique « Back to Black » sur Amy Winehouse ou au récent et quelque peu classique « Un parfait inconnu » sur Bob Dylan. Espérons d’ailleurs que ceux sur Mickael Jackson et Johnny Hallyday, les plus grandes stars, respectivement américaine et française, ne soient pas de la même veine...
Au moins, ici, pas de souci de mimétisme ou de ressemblance entre l’acteur et la star dont on retrace la vie et c’est tant mieux. Et il faut dire que le singe en CGI qui prend la place du chanteur (et de ses démons, il faut voir le film pour comprendre) est extrêmement performant et crédible au point qu’on en viendrait presque à oublier le délire initial. Ensuite, il faut avouer que le chemin narratif emprunté par « Better Man » est classique et propre à celui des trois quarts des films du genre : enfance, débuts, découverte, succès, chute et gloire sont au programme, dans un ordre adapté à la vie du chanteur et ses déboires. On apprécie tout de même que le chanteur britannique - qui a participé à l’écriture et la gestation du film - ne fasse pas l’impasse sur ses mauvais côtés et tente de porter un regard parfois un peu ironique envers lui-même. Mais sinon, c’est les grandes lignes de sa vie de célébrité qui sont retranscrites ici, de ses débuts dans le boys band Take That à sa rencontre avec la chanteuse des All Saints, Nicole Appleton, en passant par ses succès en solo. La première partie, celle de l’enfance et de Take That, est d’ailleurs plus cool et captivante que la seconde où il y a certaines longueurs et redondances.
Cependant, là où « Better Man » impressionne, c’est sur la qualité de sa mise en scène et de ses numéros musicaux. Michael Gracey, déjà à l’œuvre sur le très réussi « The Greatest Showman » nous livre un récit qui fourmille d’idées formelles, plein d’énergie, de rythme et de folies visuelles. Et celles-ci explosent lors des numéros musicaux où la discographie de Williams est utilisée à bon escient selon les passages de sa vie rencontrés dans le film. Par exemple, l’utilisation du morceau « Rock DJ » est un modèle de mise en scène. On voit le groupe Take That sortir de la maison disques sur Picadilly Circus et offrir des chorégraphies géniales où les tableaux s’enchaînent tels des morceaux de bravoure clippesques. Pareil mais sur une tonalité plus tragique avec le morceau « Angel » mis en parallèle du décès de sa grand-mère ou celui sur sa rencontre avec Nicole Appleton sur un bateau. Parfaitement intégrés narrativement et visuellement, ils font toute la différence d’un biopic sincère, amusant, qui déborde d’idées (parfois un peu trop) et carbure à l’énergie que ne renierait pas un film du genre comme « Moulin Rouge ». Une folie et une énergie qui peut être aussi épuisante que revigorante. « Better Man », c’est un film surprenant et jubilatoire pour qui aime l’originalité et l’innovation tout en étant capable de plaire à tous!
Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.