Difficile de ne pas être séduit (dans un premier temps tout au moins) par la volonté affichée de « Better Man » d’apporter un point de vue novateur dans l’univers formaté du biopic musical.
Même si le trope du singe chanteur a déjà éprouvé, notamment par Shaka Ponk (Goz, singe virtuel devenu le 7ème ou 1er membre du groupe selon le point de vue), l’utilisation de Robbie the monkey pour pitcher la vie du great pop singer, reste une idée savoureuse, tant les acteurs des récents biopics ont concentré les critiques : un Rami Malek au charisme dentaire discutable en Freddy Mercury , Austin Butler, pantin désarticulé ânonnant le king, des projets qui interrogent (Angelina Jolie en Maria Callas (…) ou encore Zao de Sagazan pressentie en David Bowie ( ??).
Ajouté à cela, l’aura de Robbie Williams qui n’égale pas celle des icônes sus citées, écrire sa légende nécessitait quelque fabulation, voire un pieu mensonge venu ici d’une affirmation de Michael Gracey, le réalisateur, selon laquelle l’idée serait née dans la tête du chanteur lui-même qui se serait toujours imaginé en singe. Robbie -le vrai- détricotera tout à fait cette légende quelques semaines plus tard,
« On dit partout que je me vois comme un singe. Mais pour être honnête, nous avions surtout besoin de trouver un moyen que les gens parlent du film et les gens en parlent parce qu’ils voient un singe
De plus, comme je ne me considère pas comme un individu évolué, le singe me correspondait parfaitement. »
Mais, au-delà du simple concept narratif, le procédé permet de développer une « sonorité » émotionnelle de tous les instants. Robbie, le monky, même s’il évolue physiquement au fil du récit, conserve un visage d’adolescent éternel, ses faux pas deviennent autant de maladresses touchantes, l’image du petit animal fragile, innocent empêtré dans un monde d’adultes dont il ne comprend pas toujours les codes fonctionne assez bien, même si elle joue de redondance presque systématique. Robert, illustrant la belle promesse du titre, devient d’un coup de baguette magique numérique, une hybridation entre cet homme meilleur et ce better monkey, une sorte de Ronkkie .
« Better Man », et c’est sa principale qualité, se nourrit par ailleurs, énormément de la relation familiale pour appuyer une humanité bienveillante, le rapport à un père absent, mais aimé par dessous-tout, la maman et la grand-mère, figures tutélaires :
« Mon père, c’est le charisme. Ma mère, c’est la passion et l’ambition. Et ma grand-mère, c’est l’amour et un soutien inconditionnels. La Sainte Trinité… »
Les scènes en duo avec le père sur « My way », leur admiration commune pour Frank Sinatra donnent lieu à de belles scènes.
Mais plus encore peut-être que ce « sentimentaliste » distillé avec une parcimonie et une justesse bienvenue, c’est le mouvement –perpétuel- qui rythme un biopic endiablé,, entrecoupé de séquences musicales chorégraphiées avec virtuosité parfois (la scène de rue entrainante sur Regent Street). Une dynamique qui séduit d’abord puis déconcerte un peu, l’objet s’apparente parfois à une plongée en apnée au découpage très rushé, se transforme par instants en mécanique usante , désordonnée, oubliant la fluidité du récit et expédiant certains éléments trop rapidement (la relation avec Nicole Appleton aurait gagné à être mieux developpée).
Bref Better man est un biopic inégal alternant le bon voire le très bon, le très brouillon, dans une esthétique numérique souvent douteuse, un film foutraque provoquant, mais attachant finalement à l’image de son modèle…