La cinéphagie du masqué l'amène parfois à faire de drôles de parallèles.
Car devant Better Man, il n'a pas pu s'empêcher de penser à Vol à Haut Risque...
Capillotracté, voire saugrenu, sans doute.
Mais les deux œuvres se rejoignent cependant sur un point : les attractions qu'elles ont proposées en ce mois de janvier 2025. A gauche, il y avait un grand nom, Mel Gibson. Ainsi qu'un attrait de fin gourmet un peu pervers, soit l'art de Mark Wahlberg dans le port de la moumoute. A droite, nous avons aujourd'hui un autre grand nom : Robbie Williams, et l'attraction de le voir incarné à l'écran par un chimpanzé tout en mocap.
Si le procédé est justifié in media res en affirmant que l'artiste se ressent comme un singe, soit un animal qui n'aurait pas évolué et renvoyé à ses instincts, la dernière ligne droite du film sera à peine plus diserte en précisant le propos et le fait que Robert n'a jamais su dépasser, par ses blessures, l'âge d'enfance.
Les effets spéciaux insufflant la vie à cette créature auront fait beaucoup parler, en particulier sur leur qualité. Mais là n'est pas le problème, loin s'en faut. Au contraire, ils sont réussis et font que l'on croit souvent à cette mise en images. Sauf que le parti pris de cette représentation ne semble pas pleinement exploité.
En effet, pourquoi se contenter de l'apparence du singe, sans en reprendre la gestuelle et les attitudes, qui auraient pu marquer un peu plus encore le fait que le chanteur se sente différent, moins que rien et étranger au monde ?
De la même manière, pourquoi cette créature est-elle de chaque plan, même ceux qui lui sont extérieurs (un passage télévisé vu par d'autres personnages, une scène de concert vue du côté du public), alors que cet animal symbolise un ressenti intime au chanteur ?
Si, en se posant ce genre de question, le procédé au cœur de Better Man pourra ressembler à un simple artifice peu utile à la narration, , il pourra cependant illustrer les expressions de « bête de scène » et de « bête de foire » pouvant parfois être accolées à la vie d'un artiste.
Une fois cet aspect évacué, il faut bien admettre que Better Man ne se démarque jamais de la formule consacrée du biopic, a fortiori musical, de plus en plus décriée aujourd'hui. Sauf que le film raconte plutôt bien son affaire, sans faire mystère du cynisme et de l'opportunisme du showman à la poursuite de l'ombre de l'absence de sa vie et d'un remède à ses failles intimes.
Sans faire non plus mystère d'une certaine face sombre, entre addictions, dépression et milieu musical en forme de panier de crabes, à l'instar du groupe Take That et de son manager.
Et puis, Michael Gracey, comme dans The Greatest Showman, a l'art pour dynamiser son récit, offrant une composition en plan séquence d'une énergie euphorisante, une course automobile à l'issue de laquelle Robbie se noie littéralement, ou une scène de concert en mode épique et guerrier.
Dommage cependant que Better Man fasse une bonne quinzaine de minutes en trop, offrant un ventre mou dans son histoire. Mais surtout, dommage que l'oeuvre retombe dans les travers du biopic via un final qui n'en finit pas de ne pas finir et le sirop d'érable de la réconciliation étalée alors que, un comble, Robbie reprend My Way, que l'on pourrait traduire ici par « mon propre chemin », ou « à ma manière ».
Alors même que Better Man, s'il a choisi de raconter son histoire de manière atypique, le fait en se conformant aux conventions d'un genre qu'il peine à dépasser pleinement, alors même que jusqu'ici, il avait su convaincre le masqué de l'intérêt de porter à l'écran la vie d'un artiste qu'il ne connaissait uniquement par l'un ou l'autre de ses tubes.
Un concert en forme de best of qui se termine sur une fausse note, voilà un effet larsen qui fait quelque peu désordre.
Behind_the_Mask, monkey business.