Bienvenue à Surburbicon revient de loin, vous savez...
Il s'agissait d'abord d'un scénario que les frères Coen ont finalement remisé (à raison ?) au fond d'un tiroir, depuis la fin des années 90.
George Clooney était un acteur star, à cette époque. C'était avant qu'il ne se fabrique un rôle de réalisateur pseudo concerné. Parce qu'il est toujours de bon ton de le réaffirmer à heure régulière, il désirait ce que coup-ci, pour sa sixième mise en scène, causer comme la plupart de ses petits camarades de jeux des tensions raciales qui étranglent son cher pays. Le voilà donc à vouloir adapter une histoire vraie, sans pour autant trouver le point de vue adéquat.
Bienvenue à Suburbicon est malheureusement perpétuellement le symptôme de cette approche duale, dont les éléments ne s'imbriquent jamais les uns dans les autres. Par paresse, peut être, par des trop grands fossés entre ce que les uns et les autres voulaient raconter, sans doute. Car si le film de Nespresso n'est pas désagréable à suivre, il nous sert cependant deux lignes d'actions qui ne se rencontrent presque jamais, l'une servant littéralement d'arrière plan presque étranger à l'autre. Drôle d'impression.
Clooney ne cède pas sur son sujet "concernant" et sérieux, même si pour cela, il nous sert un jingle de promo de quartiers suburbs qui a tout de l'angélique cynisme. C'est que des noirs emménagent, voyez-vous, brisant les apparences proprettes et les habitudes bon teint du rêve américain... Que du classique, en somme, que George assène à intervalles constant au sein d'une histoire d'arnaque à l'assurance qui a tout du typique du duo, dans une ambiance un peu Fargo. Que du classique venant des Coen, une fois encore.
Sauf que les deux conceptions du show s'annulent l'une et l'autre dans une cohabitation assassine. La satire de la société américaine tourne rapidement court parce qu'elle grille toutes ses cartouches d'un coup, le temps d'un prologue qui séduit. Le concernant de la chose tourne à vide, se contentant d'un sitting et d'une scène de supérette déjà vu. George n'a déjà presque plus rien dans les mains de son sujet initial.
Pas étonnant donc qu'il se rabatte sur la marotte des Coen brothers, pas trop mal vue mais qui est filmée de manière assez molle du genou, sans grands enjeux ni ampleur. Les personnages typiques du duo sont presque tous là, dans toute leur médiocrité et leur petitesse, mais sans en être pour autant attachants. Pour vous rendre compte des relatifs dégâts, le rôle le plus mémorable du lot est de la race des seconds, tenu par un Oscar Isaac qui semble s'amuser comme un petit fou, le temps d'une scène où il tourne autour de sa victime.
Il y aura bien cet emballement final de l'action, violence graphique en mode Tex Avery à l'appui. Mais c'est trop attendu, connaissant le duo de scénaristes à la manoeuvre. Cela divertit et laisse une impression pas désagréable. Mais malheureusement avec un goût de trop peu.
Car si on retrouve les obsessions clooneysques le temps de quelques flashs média, il y aura aussi cette chute bien pensante,
où tous les méchants seront bien punis et où les frontières s'abolissent de manière assez simpliste gant de baseball à la main.
Tout cela fait de Bienvenue à Suburbicon quelque chose de vaguement agréable à suivre, mais surtout de terriblement anecdotique au vu des personnes impliquées dans le projet. Quelque chose de tenue acceptable mais sans grand relief. Qui pourra faire naître, dans un soupir, un "dommage" au final assez frustrant.
Behind_the_Mask, épiscopalien du dimanche.