Et bien écoutez... J'ai passé un bon moment. Pas le bon moment du blockbuster que tu oublies, non le bon moment du film intéressant qui reste quand même en tête. Je reste cependant un peu sur ma fin et aurais aimé mettre 8.
Le film est coloré, trop pour certains, mais j'aime ce côté too much assumé qui nous plonge véritablement dans une représentation qu'on accepte des 50' et 60'. Tim Burton assure toujours ici une superbe direction artistique, et prouve une fois de plus qu'il n'est pas que squelettes / rayures noires et blanches / coutures / fantastique / gothique. Non, il prouve que Tim Burton est avant tout le cinéaste des incompris, des parias, des créateurs trop timides pour s'affirmer face aux beau parleurs sans substance qui peuplent ce monde, comme ce personnage de Margaret écrasé par le fou Walter Keane.
J'aime beaucoup cette histoire d'appropriation de droit d'auteur, cette critique du faire-savoir qui prime sur le savoir-faire. Margaret est un personnage attachant qu'on se complait totalement à soutenir face au vol dont elle est victime. On tombe tout comme elle dans le piège sans vraiment voir venir la menace, mais cependant on a quand même du mal à comprendre les choix qu'elle fait... Pourquoi accepter un tel sort ? Plus tard elle dira qu'elle était trop faible pour dire quelque chose, mais ça me parait trop gros, peut-être aurait-il fallu davantage caractériser le personnage en montrant sa faiblesse via des traumatismes; la pilule aurait passé davantage.
Le personnage de Walter, l'antagoniste, est pour sa part un peu trop unidimensionnel à mon gout. Il est cet énième méchant qui est méchant parce qu'il est... le méchant. On comprend qu'il se prend au jeu et qu'il va progressivement s'approprier toute l'oeuvre de sa femme, mais justement, ce n'est pas progressif ! Ca se passe en deux scènes, on a du mal à croire qu'il soit à ce point complètement fou et diabolique. Davantage de caractérisation aurait été également ici bienvenue.
Ce que j'aime le plus dans le film est cette réflexion sur la création artistique, c'est assez inspirant quand on y pense de se dire qu'on peut être personne tout en ayant quelque chose d'incroyable à offrir au monde. Ici, Margaret n'est personne, inconnue du public et du monde de l'art; et pourtant elle va créer d'incroyables oeuvres dans son atelier de 5m². Mais pourtant quand on voit l'attitude assurée de Walter, qui " a l'air d'un peintre de loin " et qui contraste avec celle toute timide et introvertie de Maragaret, on jurerait que c'est lui l'auteur de ces oeuvres ! Tout est dans l'apparence... Méfiez vous, plus les personnes ont une importance présence physique et de la parlotte, moins il est probable qu'ils aient de la substance... Ne jugez pas les parias que vous considérez comme " loosers ", dans l'obscurité, ils observent et créent.
Voilà, un film esthétique très agréable, qui s'inscrit totalement dans la thématique des apparences chère à Burton; mais qui manque un peu de crédibilité et qui ne gratte pas à fond son sujet très intéressant.
7,5 / 10