Quand on connaît les dessous de la production et de la réalisation de "Big Trouble", on comprend aisément en quoi ce film n'est pas le véritable dernier film de Cassavetes : "Love Streams" restera très clairement le testament de son auteur. Mais tout de même : étant donnée la nature du script, le film ne pouvait être tourné sans l'autorisation d'Universal, le film étant une sorte de variation comique et chaotique de "Double Indemnity" de Billy Wilder. Suite à le défection des uns et des autres, producteur et réalisateur, John Cassavetes fut désigné comme pompier en chef par son ami Peter Falk, et c'est la seule raison qu'on puisse trouver pour voir son nom affiché sur cette comédie qui n'a rien de son style et qui ne ressemble en aucune sorte à l'aboutissement de sa trajectoire cinématographique.


"Big Trouble" est une comédie qui se fait de plus en plus foutraque, à mesure que le noyau dur des protagonistes agglomère autour de lui davantage de personnages qui se trouvaient sur son chemin. Tous sont de gros cinglés qui essaient de construire une arnaque à l'assurance (sur le thème de "Double Indemnity", donc), les uns en manigançant un plan complètement farfelu et les autres parce qu'ils ont besoin d'argent pour envoyer des triplets à la prestigieuse et onéreuse université de Yale. C'est en ces termes que démarre l'histoire de ce courtier en assurance qui n'était pas du tout destiné à tant de fantaisie, au cœur d'un faux accident de train, d'un faux cadavre mutilé, et même d'une fausse mort — qui ne trompera pas le détective en charge de l'enquête pour la compagnie d'assurance : hop, lui aussi, embarqué dans cette fuite en avant remplie de mensonges et de quiproquos. Alan Arkin et Peter Falk ne s'en sortent pas si mal malgré les cabotinages imposés par le rôle de l'un et l'air constamment désabusé de l'autre. Le film franchit très vite un point de non-retour en matière d'absurde généralisé, et le burlesque des situations n'aurait sans doute pas été aussi savoureux s'il ne s'était pas agi du dernier film de son "auteur" (on aura rarement été aussi éloigné du concept d'auteur, précisément).

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le 10 mai 2020

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Morrinson

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